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Belgique-France : nos deux peuples sont liés par l’histoire

par Louis Sarkozy
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Chaque semaine à partir de ce mardi, l’essayiste Louis Sarkozy publiera une chronique dans les colonnes de 21 News. Et pour ouvrir le ban, quoi de plus normal que de plonger dans l’Histoire pour rendre hommage à l’amitié franco-belge ?

« Il est évident, écrivait le Général de Gaulle dans le troisième tome de ses Mémoires de guerre, que le peuple Belge confond sa joie et son espérance avec celles du peuple français. » Cette vérité fondamentale a dépassé toutes formes de contestation. Pour le meilleur et pour le pire, notre destin est commun. Nos deux peuples sont liés non seulement par de grandes institutions politiques, économiques et sociales, mais aussi par une illustre Histoire qui approche son millénaire.

Dès le XIIe siècle, marchands et villes françaises dépendent étroitement des textiles produits par leurs voisins du nord-est. La qualité et la réputation des draperies flamandes créent un vaste réseau commercial qui alimente nos deux prospérités. Cette relation économique est ensuite consolidée par les ducs de Bourgogne, qui unifient un puissant territoire s’étendant des Flandres à la Bourgogne et le rattachent de plus en plus, politiquement et culturellement, au royaume de France. Plus tard, les guerres de religion, puis les guerres de Succession d’Espagne et d’Autriche, scellent cette alliance dans le sang, renforçant des liens indélébiles entre nos deux nations à travers des siècles de conflits partagés.

La culture a affirmé ce que la géographie avait déjà rendu évident.

Certes, cette relation, comme tant d’autres, est en partie née d’intérêts étatiques. Mais les affinités culturelles, linguistiques et religieuses croissantes ont donné naissance à quelque chose de bien plus profond. La culture a affirmé ce que la géographie avait déjà rendu évident : une proximité naturelle qui allait au-delà des alliances politiques, unissant durablement les peuples français et belge dans une histoire partagée.

Mais à l’aube de la modernité, l’indépendance de la Belgique demeurait un rêve fragile. Pendant des siècles, elle avait été sous l’emprise de puissances étrangères, changeant de mains au gré des alliances et des conquêtes. Après la chute de Napoléon, les puissances s’étaient entendues pour la rattacher au Royaume des Pays-Bas. Comme si le destin de cette terre pouvait se régler dans les salons diplomatiques d’Europe. Mais alors, un sentiment national naissant, bercé par la sympathie et le soutien de la France, commençait à éclore. Le peuple belge, animé d’une ferveur nouvelle, refusait désormais de voir son avenir décidé par des émissaires étrangers. En 1830, la Belgique se leva pour elle-même, puissante et résolue, pour la première fois de son histoire – et certainement pas pour la dernière – affirmant, contre vents et marées sa volonté de marcher vers son propre destin. L’affinité entre nos deux peuples était si profonde que les trois candidats pressentis pour le trône de Belgique étaient tous français. Ce n’est que face au tollé général des autres puissances européennes, inquiètes de cette union latente, que le prince Louis, fils de Louis Phillipe 1er, alors Roi des Français, fut empêché de ceindre la couronne belge. L’Europe redoutait cette alliance comme un flamboiement d’ambitions partagées, et ce rêve d’une Belgique française s’éteignit avant même de pouvoir s’incarner. Qu’importe. Notre union état déjà trop profonde pour être détruite par la crainte de nos adversaires communs.

La Belgique nouvellement indépendante mit moins d’un siècle à forger sa première légende. L’invasion des armées allemandes, qui visait à soumettre et à détruire le pays, aboutit à l’exact opposé : « La Belgique, écrit l’éminente historienne Barbara Tuchman, où se produit l’une des rares apparitions du héros dans l’histoire, est soulevée au-dessus d’elle-même par la conscience simple de son roi et, confrontée au choix d’acquiescer ou de résister, prend moins de trois heures pour prendre sa décision, tout en sachant qu’elle peut être mortelle. »

En risquant la vie de son pays, Albert Ier l’affirma. En choisissant la guerre, il lui garantit la vie. Comme le constatent nos amis ukrainiens et israéliens, ce ne sont pas les traités qui font les nations. Les traités ne font que délimiter les États ; ce sont les légendes et les martyrs qui font les nations. Albert 1er donna à son pays sa plus belle légende.

Aucune diversité n’est plus fondamentale que la diversité intellectuelle.

Une génération plus tard, une nouvelle agression allemande vint troubler notre marche vers la prospérité. Cette fois, la résistance prit la forme d’opérations secrètes, d’intrigues et de subterfuges, souvent menés conjointement et s’intensifiant au fil des années d’occupation. Et enfin, la Victoire vint couronner notre alliance une fois de plus, lançant cette longue marche vers un avenir commun que nous poursuivons encore aujourd’hui. Ainsi, nous voici deux nations liées par des siècles de tourments et par les innombrables morts qui reposent de part et d’autre de notre frontière. Face aux défis communs – croissance économique irrégulière, bureaucratie pesante, insécurité croissante, immigration incontrôlée, et quête identitaire – ce n’est qu’ensemble que nous trouverons des réponses. Deux sœurs, fortes d’elles-mêmes et de leur confiance, peuvent envisager l’avenir avec courage et ambition.

C’est donc avec un immense plaisir que je contribue à ce média émergent, 21 News. Je le fais dans l’esprit de nos deux nations et de leur histoire commune, mais aussi au nom de la pluralité des médias. Depuis longtemps, nos amis de gauche nous disent que la diversité devrait être l’un des piliers de nos sociétés. Ils ont raison ! Mais nous leur répondons aimablement qu’aucune diversité n’est plus fondamentale que la diversité intellectuelle. Car sans elle, il n’y a pas de véritable diversité !

Louis Sarkozy

(Photo Belgaimage : la tour Eiffel illuminée aux couleurs belges)

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