Comme en 2016, Donald Trump a surpris élites, médias de gauche et industrie du sondage pour emporter l’élection présidentielle massivement (à 9h09 il en est à 266 grands électeurs sur les 270 nécessaires mais il pourrait terminer avec 300 grands électeurs) alors que jusqu’à hier soir on nous annonçait un résultat serré et peut-être des semaines de contestation…
La première raison est le remplacement en catastrophe de Joe Biden après le débat épouvantable de fin juin durant lequel le vieux président démocrate a montré à la face du monde des signes évidents de faiblesse cognitive. Or l’appareil démocrate le savait. Kamala Harris, sympathique mais non préparée à la magistrature suprême, l’a remplacé au pied levé.
Donald Trump a su mobiliser l’électorat traditionnel et galvaniser sa base électorale, notamment la classe moyenne sans diplôme universitaire et les électeurs des zones rurales, en mettant l’accent sur des thèmes tels que l’économie, l’immigration et le patriotisme.
Trump a convaincu bien des minorités
Mais non content d’actionner sa base solide de « MAGA », il a reçu le soutien des minorités : les jeunes, les électeurs noirs et latinos, groupes traditionnellement acquis aux démocrates. Par exemple, certains sondages ont montré que Trump obtenait jusqu’à 20 % des voix parmi les électeurs noirs, un niveau sans précédent pour un candidat républicain depuis 40 ans. Il a même su convaincre la communauté arabo-musulmane du Michigan, malgré son soutien indéfectible à Israël.
Pour cet électorat aux traditions bien ancrées, le wokisme qui déstabilise l’aile gauche du Parti démocrate (notamment la théorie du genre), Trump apparaît un rempart pour la défense des valeurs traditionnelles autour de la famille et de la figure solide du père de famille.
Malgré l’appel de centaines de patrons démocrates à voter pour Kamala Harris, Trump a reçu vraisemblablement le soutien du monde des affaires et il est probable que le ralliement du plus charismatique d’entre eux, Elon Musk, a joué alors que Mark Zuckerberg, patron de Meta, l’a joué discret. En intimant l’ordre à « son » média, le Washington Post, de ne pas se rallier à Harris, Jef Bezos avait également senti le vent tourner.
Trump a également eu la bonne stratégie pour les États-clés. La campagne de Trump a concentré ses efforts sur des États pivots comme la Pennsylvanie, le Michigan et le Wisconsin, reproduisant sa stratégie victorieuse de 2016. Cette focalisation lui a permis de remporter des victoires cruciales dans ces États. En se concentrant sur des thèmes tels que la sécurité nationale et l’économie, Trump a réussi à convaincre une partie des électeurs indécis, notamment dans les États-clés, de voter en sa faveur.
Kamala Harris contrée
Les faiblesses de l’adversaire ont été exploitées notamment avec le très structuré J.D. Vance, vice-président surdiplômé qui lissait les extravagances de son maître. La candidature de Kamala Harris a rencontré des défis, notamment en matière de mobilisation de l’électorat démocrate traditionnel et de réponse aux préoccupations économiques des électeurs. Paradoxalement, le Parti démocrate a été plus ou moins lâché par les minorités. La gauche américaine a été victime des mêmes erreurs que la gauche française « Terra Nova », qui a oublié les vraies préoccupations des électeurs américains. Les leçons de la campagne ratée de Hillary Clinton n’ont pas été retenues, le parti démocrate est tombé dans le même panneau.
Certains attribuent aussi sa victoire à une bonne couverture sur les réseaux sociaux, un comble puisque Donald Trump avait été banni de X (Twitter à l’époque).
Donald Trump a également réussi les deux examens des débats présidentiels, contrairement à ce qu’on a pu lire ça et là en ayant une dialectique claire sans dévier, malgré ses saillies habituelles notamment sur les animaux domestiques, alors que Kamala Harris a peiné à donner des réponses claires à des questions simples, notamment dans l’exercice difficile de l’interview en tête-à-tête.
Malgré les controverses, les rassemblements de Trump ont attiré de grandes foules, démontrant une base électorale enthousiaste et motivée, ce qui a contribué à une forte participation en sa faveur.
Enfin, les deux tentatives d’assassinat dont Trump a été victime (ça s’est joué à quelques centimètres) ont peut-être humanisé un homme brutal et dur, en provoquant une certaine empathie.
Et maintenant ?
Les réactions internationales, notamment en Belgique, pourraient traduire des appréhensions face à cette victoire, perçue par certains comme un facteur de déstabilisation. Cependant, quatre éléments sont à noter :
- Trump pourrait obliger l’Europe à renforcer sa défense commune (OTAN), à ajuster sa politique étrangère et à soutenir son secteur industriel. L’Europe va devoir prendre son destin en main tant au niveau militaire qu’économique et il en est plus que temps. La désindustrialisation de l’Europe continue d’avancer à marche accélérée.
- Malgré sa réputation de « fauteur de troubles », Trump n’a pas initié de conflits armés durant son mandat. Il semble enclin à promouvoir une résolution du conflit en Ukraine et pourrait offrir une médiation acceptable pour Kiev et Moscou, tous deux épuisés après deux ans de guerre.
- Au Moyen-Orient, Trump pourrait accélérer le processus de paix amorcé avec les Accords d’Abraham, réunissant des pays arabes sunnites et Israël. La République islamique d’Iran, après le massacre du 7 octobre, reste un point d’attention stratégique pour Trump, qui pourrait s’opposer à l’influence iranienne dans la région. L’élection de Trump est définitivement une mauvaise nouvelle pour la « mollarchie ».
- Trump devrait poursuivre ses efforts pour réduire le déficit commercial abyssal des États-Unis par rapport à la Chine.
A.G.
(Photo Belgaimage)