Les actions de bpost et de Proximus ne séduisent plus, sur les marchés. Leur cours ne cesse de diminuer. Notre chroniqueuse Typhanie Afschrift se demande ce que fait encore l’État, réputé pour son absence de vraie gestion financière, dans le capital de ces groupes.
Georges-Louis Bouchez a bien raison d’avoir déclaré, à propos de Proximus, que l’État est le plus mauvais des actionnaires.
Pas seulement parce que, alors qu’au cours des dernières années, les marchés sont en général à la hausse, l’action Proximus, dans laquelle l’État belge a conservé une participation de 50 %, a perdu… 70 % de sa valeur !
Si les autres participations détenues par l’État avaient été bénéficiaires, on aurait pu se dire qu’il s’agissait d’un accident.
Mais, malheureusement pour les contribuables, c’est de manière pratiquement systématique que leur argent a été mal investi par l’État. Ainsi, les actions détenues par l’État dans bpost ont également chuté dans de très grandes proportions.
Que fait l’État dans des sociétés commerciales ?
La vraie question est de savoir quel sens il y a, pour l’État, à conserver, ou à acquérir, des participations dans des sociétés commerciales.
Proximus a hérité de la fonction initiale de la tristement célèbre Régie des télégraphes et téléphones, monopole d’État dont se souviennent tous ceux qui, à l’époque, devaient attendre trois ou quatre mois pour qu’on leur installe une ligne téléphonique…
Aujourd’hui, Proximus est dans une situation de concurrence avec d’autres entreprises qui font la même chose qu’elle. Elle n’a plus aucune fonction qui justifie une intervention de la puissance publique, à supposer qu’un jour c’eut été le cas.
Officiellement, la raison pour laquelle l’État a conservé cette participation, c’était parce que Proximus distribuait un important dividende, et que cela constituait une importante recette pour l’État.
On essaye donc de faire croire qu’il s’agissait d’un bon placement. Cela traduisait simplement l’éternel besoin d’argent de nos politiciens : un bon actionnaire essaye que sa participation soit profitable sur le long terme, et pas seulement de vider la trésorerie de la société dans laquelle il a investi.
Quand vos impôts servent la spéculation
Aujourd’hui encore, on défend l’idée qu’on ne pourrait pas vendre les actions de Proximus, parce que… le cours est trop bas ! Après avoir spéculé pendant des années avec l’argent du contribuable et perdu beaucoup d’argent, on continue à spéculer en espérant que l’action va peut-être remonter. On devrait plutôt se demander s’il est légitime, en l’absence de toute autre utilité publique, de spéculer avec l’argent du contribuable. Autrefois et aujourd’hui.
C’est la même chose avec bpost. Son activité historique, transporter du courrier « papier », est en voie de disparition. Elle essaye d’investir un peu n’importe comment, pour encore servir à quelque chose, mais de tels investissements, souvent à l’étranger, n’ont aucun sens pour une entreprise partiellement publique belge. Nous ne payons pas des impôts pour que l’État investisse dans des activités concurrentielles à l’étranger, et qui délocalise en Inde une partie de ses services informatiques.
Dans le même contexte, on peut se demander pourquoi l’État a longtemps conservé 10 % des parts des actions de BNP Paribas – une banque française – et en conserve encore une partie. Cette participation ne lui donne aucun pouvoir de décision, dans une banque d’ailleurs concurrente de Belfius, propriété de l’État à 100 %. Pourquoi avoir gardé une telle participation depuis des années, sans aucune utilité ? L’on paye beaucoup d’impôts en Belgique, et certainement pas pour spéculer sur les actions d’une banque française.
Il faudrait revoir l’ensemble du système, et céder, au moment propice, toutes les participations détenues dans des entreprises, par l’État fédéral, les régions, et leurs différentes holdings.
Georges-Louis Bouchez a raison de dire que l’État est un mauvais actionnaire. Il condamne ainsi l’idée, chère à certains économistes, de « l’État stratège ». Mais il faut en tirer les conclusions et se débarrasser d’avoirs que l’État gère aussi mal. Un peu de cohérence dans la gestion des deniers publics ne ferait vraiment pas de tort !
Typhanie AFSCHRIFT
(Photo Belgaimage)