Il est plus que temps de songer à une réinstauration du service militaire en Belgique. La guerre en Ukraine a démontré que nous ne pouvons plus rester longtemps les vassaux des Américains. D’autres arguments plaident pour un retour de la conscription obligatoire. Une opinion d’Alain Schenkels, chef d’entreprise et membre du MR.
Consacrer un certain temps de sa vie au service de son pays est un noble devoir, à condition que ce service s’effectue dans le respect de l’individu et qu’il dispense la formation adéquate pour affronter une éventuelle agression. Le conflit en Ukraine met en lumière la persistance des guerres conventionnelles impliquant des fantassins, contrairement aux discours ayant accompagné la suspension du service militaire. Dans cette optique, le rétablissement d’un service militaire adapté aux réalités actuelles semble pertinent, à la fois pour susciter l’intérêt des jeunes envers une carrière militaire et pour former une partie de la population aux techniques de combat.
Il n’est cependant pas nécessaire de former toute la population, mais d’augmenter la capacité de notre armée professionnelle à défendre le pays grâce à l’apport de miliciens préalablement formés.
Dans l’ancienne mouture du service militaire obligatoire, un milicien devait consacrer près d’une année de sa vie sans jamais être rappelé par la suite, alors que les technologies et les techniques de guerre évoluent à un rythme effréné. Dans l’optique d’un nouveau service militaire obligatoire, il est plus pertinent de raccourcir la durée du service, tout en y dispensant les connaissances fondamentales, et de prévoir des rappels réguliers pour rafraîchir les acquis et s’adapter aux changements technologiques.
Le modèle suisse du service militaire obligatoire est souvent cité comme un exemple de réussite. Il permet de former une réserve de citoyens soldats relativement bien entraînés, tout en limitant la durée du service militaire initial, suivi de plusieurs rappels sur une période de neuf ans avant d’être libéré de leurs obligations militaires. Ces rappels permettent aux anciens conscrits de se maintenir à niveau et de s’adapter aux évolutions militaires.
Le modèle suisse est critiqué pour son coût et son caractère contraignant. Cependant, l’argument du coût face à l’avantage d’une réserve d’hommes et de femmes formés au combat n’est pas recevable. La capacité à défendre le pays est primordiale, et l’intégration de ce service militaire dans une armée européenne est indispensable. Le caractère contraignant peut effectivement constituer un frein, mais il doit être relativisé au regard de l’objectif initial.
Le service militaire obligatoire pour tous, hommes et femmes ?
Il faudrait mettre tous les jeunes sur un pied d’égalité sans toutefois les obliger à effectuer un service de type militaire. Dans ce contexte, il serait judicieux d’offrir aux jeunes la possibilité de choisir entre un service militaire et un service civil de durée équivalente.
En 2010, la France a instauré un service civique non obligatoire encourageant l’engagement citoyen. Il a pour objectif de renforcer la cohésion nationale et de favoriser la mixité sociale et offre la possibilité aux jeunes de s’engager pour une durée de 6 à 12 mois dans une mission d’intérêt général.
En parallèle au service militaire, ce type de service civil permettrait de laisser un libre choix aux jeunes face à un engagement au service de leur pays.
« Le service militaire permettrait à la Belgique de disposer d’une armée de taille suffisante pour se défendre contre les menaces extérieures, en coopération directe avec une armée européenne. »
Un service obligatoire mixte permettrait à tous les jeunes citoyens, hommes et femmes, de contribuer à la société de manière égale, qu’ils choisissent la voie militaire ou civile. Il offrirait plus de flexibilité pour répondre aux besoins changeants de la société, en permettant d’orienter un plus grand nombre de jeunes vers des secteurs en pénurie de main-d’œuvre, par exemple. Il valoriserait la diversité des compétences et des talents en permettant aux individus de s’orienter vers le domaine qui correspond le mieux à leurs aptitudes et aspirations.
L’Europe doit se donner les moyens de sa défense !
Il faut se rendre à l’évidence : la situation de l’Europe ne permet pas à l’heure actuelle de faire face à un conflit important sans l’aide militaire des États-Unis. Cette dépendance est un risque bien trop important pour l’Europe — et donc la Belgique. Il faut urgemment remédier à cette situation en créant une armée européenne professionnelle avec une réserve importante de miliciens prêts à seconder l’armée en cas de conflit majeur. Par ailleurs, posséder une armée avec un potentiel de combat élevé permet d’écarter certaines menaces extérieures et, in fine, des guerres.
Notre armée professionnelle est trop petite pour assurer une défense adéquate en cas de conflit majeur. Le service militaire permettrait à la Belgique de disposer d’une armée de taille suffisante pour se défendre contre les menaces extérieures, en coopération directe avec une armée européenne. Ce service militaire peut également contribuer à renforcer la cohésion sociale et le civisme en rassemblant des jeunes de tous horizons et en leur inculquant des valeurs telles que le patriotisme, le respect et la discipline. Il peut aussi leur donner l’occasion d’acquérir des compétences précieuses pour leur vie future, telles que le travail en équipe, la résolution de problèmes et le leadership.
S’il est important de réinstaurer un esprit patriotique chez les jeunes en instaurant un processus continu qui vise à nourrir chez eux un sentiment d’appartenance, de fierté et de responsabilité envers leur pays, il est indéniable qu’il faut tenir compte du fait qu’une partie non négligeable de la population — tant au nord qu’au sud du pays — aspire à une autre forme d’appartenance ou d’indépendance, et que nombre d’entre eux ne feront jamais le choix des armes pour sauver ladite « Belgique ».
Qu’importe, quelle que soit la vision politique de la « patrie », in fine, c’est avec la même volonté de sauver leurs familles, la paix et leurs vies dans un État démocratique que les miliciens prendront les armes pour se défendre contre toute invasion ennemie. Car même si notre démocratie est imparfaite, elle est le seul modèle qui permet une liberté de pensée et de parole — de l’extrême gauche à l’extrême droite — sans risque de persécutions par le pouvoir en place. Quelles que soient les motivations de chacun, il est primordial de s’unir pour défendre notre modèle de vie, même au prix d’une guerre pour restaurer la paix dans nos régions.
Un besoin urgent de concertation
La décision d’instaurer un tel système implique une réflexion approfondie et une large concertation avec les organisations de la société civile, l’armée et les experts concernés. Mais le temps presse, l’Europe se doit de se donner les moyens d’organiser dans les plus brefs délais une armée européenne regroupant tous les États membres, lui permettant ainsi de se protéger de toute attaque ou invasion ennemie.
Même si un accord entre les 27 États membres n’est pas rapidement voté pour constituer une réserve de soldats, cela n’empêche en rien les États qui font le choix de la protection de mettre en place un service militaire obligatoire et ainsi former une partie de la population aux techniques de combat et de défense du pays.
Alain Schenkels, Chef d’entreprise et membre du MR
(Photo Belgaimage : le Roi Philippe en visite au Service d’utilité collective, Leopoldsburg, 24 octobre 2024)