L’hiver 2002 a été marqué, à la Ville de Bruxelles comme dans de nombreuses autres villes de Belgique, par un rebranding pour le moins surréaliste : le « Marché de Noël » a été remplacé par les « Plaisirs d’Hiver ». Ce changement fait écho à celui opéré en 2014 pour les congés scolaires, où des appellations traditionnelles ont été débaptisées : les « Vacances de la Toussaint » sont devenues les « Vacances d’automne », les « Vacances de Noël » ont été renommées les « Vacances d’hiver », et les « Vacances de Pâques » sont désormais les « Vacances de printemps ».
Pourtant, Noël incarne depuis des siècles bien plus qu’une simple fête religieuse : c’est un moment d’unité, d’espoir et de générosité, profondément ancré dans la vie des croyants comme des non-croyants. Les agnostiques et athées admirent la crèche de la Grand-Place, y voyant un épisode historique plus qu’un symbole religieux. Les musulmans de Bruxelles, eux aussi, se joignent volontiers à l’esprit festif. Alors, pourquoi ce besoin soudain de réécrire une tradition qui ne dérangeait personne ?
Cette idée d’une laïcité excessive, censée ménager des sensibilités que personne ne revendiquait, semble avoir germé dans des esprits déconnectés des réalités. Résultat : les « Plaisirs d’Hiver », une appellation sans charme, fruit d’un brainstorming raté, sont désormais omniprésents.
Noël, une fête universelle
Sous prétexte de préserver une neutralité, les élus locaux ont sacrifié une tradition universelle aux racines bien antérieures à l’ère chrétienne. Noël est célébré de Bangkok à Rio, de New York à Dubaï, transcendant les cultures et les croyances. En imposant ce changement sans concertation, ils ont illustré une déconnexion flagrante entre les politiques et les citoyens qui, à l’époque, avaient massivement protesté via des pétitions. En vain.
Ce choix surréaliste intervient dans un contexte où les villes font face à des défis autrement plus urgents : sécurité, propreté, désertification commerciale… Drôle de priorité.
En 2021, la Grand-Place a même vu apparaître un sapin électronique au coût exorbitant de 40 000 euros, remplaçant le traditionnel sapin de Noël. Cette innovation sans âme a suscité l’indignation générale, forçant les autorités à faire marche arrière.
La neutralité, version édulcorée de la laïcité française, n’a pas vocation à effacer deux millénaires de traditions, mais à garantir une coexistence harmonieuse entre religions, d’une part, et entre croyants et non-croyants, d’autre part. Ce n’est pas en supprimant nos repères culturels que l’on bâtira un « vivre-ensemble », mais en les chérissant et en les enrichissant.
Hélas, les « Plaisirs d’Hiver » semblent désormais solidement ancrés dans nos calendriers. Tartuffe n’aurait pas fait mieux.
Pourtant, Noël est un héritage à préserver, non une mode à reléguer au second plan. Oserait-on souhaiter, ce 25 décembre, un « Joyeux Hiver » ? Bien sûr que non. Alors, à tous nos lecteurs, croyants ou non : Joyeux Noël !
La rédaction
(Photo Belgaimage : les Plaisirs d’hiver 2022 à Bruxelles)