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Édito – À Gaza, Trump renverse la table

par Nicolas de Pape

L’idée de Donald Trump de transformer Gaza en joyau de la Côte d’Azur peut sembler absurde. Pourtant, le président américain a au moins le mérite de proposer une solution à un problème qui nécessite du pragmatisme.

Reconstruire Gaza implique d’abord de creuser en profondeur pour éradiquer les centaines de kilomètres de tunnels et neutraliser les explosifs encore dissimulés. Non seulement pour éviter toute résurgence du Hamas – qui n’est pas totalement éradiqué –, mais aussi pour garantir la sécurité des ouvriers chargés de reconstruire les villes.

Les colonnes de Gazaouis remontant vers le nord ne doivent pas tromper : ceux qui ne retrouveront jamais leur maison, que feront-ils ? Rester sur place à contempler les ruines ?

La priorité reste l’éradication complète du Hamas. Or, loin d’avoir rendu les armes, le mouvement se renforcera avec la libération de centaines de prisonniers palestiniens en échange des otages israéliens – une opération que certains médias présentent comme un échange de « femmes et d’enfants » voire « d’otages » alors qu’il s’agit pour une part substantielle d’anciens terroristes. Pour le Hamas, cet échange est, à l’évidence, une manière de se « refaire ». C’est pourquoi les échanges otages/prisonniers s’échelonnent sur une longue période.

Le 7 octobre 2023, le Hamas a lui-même déclenché la tragédie que vivent les Gazouis. L’objectif du mouvement terroriste était d’attirer Israël dans le piège de Gaza pour y faire le maximum de victimes surtout palestiniennes. Le Hamas s’est employé à l’y aider en se dissimulant parmi des cibles civiles de toutes sortes. L’objectif de Yayah Sinouar, le chef déchu, était de gagner la guerre de la communication et de salir au maximum l’image de l’État hébreu. Mission accomplie.

Trois options

Israël, de son côté, refuse de voir Gaza reconstruite tant qu’il n’a pas l’assurance que le béton et le ciment ne seront pas détournés à des fins militaires.

Une fois ces craintes levées, trois options se dessinent :

  1. Reconstruire Gaza… en mieux. Imaginer un Monaco du Proche-Orient, avec 40 km de plages, des hôtels de luxe et des quartiers modernes pour les habitants… Un projet ambitieux qui nécessiterait dix ans de travaux et 100 milliards de dollars, ainsi que des déplacements temporaires de population. Un défi de taille mais porteur d’espoir.
  2. Laisser plus ou moins la situation en l’état avec des camps de réfugiés (des vrais) au milieu de quartiers plus ou moins en ruine, des habitants dépendant éternellement de l’aide internationale et des jeunes Gazaouis qui ne pensent qu’à se venger.
  3. Faire table rase et transformer Gaza en no man’s land. Dans ce scénario qui ne peut s’envisager qu’au travers d’un sommet international qui en déterminerait les contours, les 2,4 millions de Gazaouis devraient être relogés ailleurs. Cela supposerait de briser le mythe du Palestinien attaché à sa terre et de convaincre les États arabes voisins d’accueillir cette population.

Or, c’est une vérité peu dite : les Palestiniens ne sont pas les bienvenus dans le monde arabe. Expulsés de Jordanie en 1970 – où l’OLP avait établi un Etat dans l’Etat – vers le Liban ce qui mena à la guerre civile en 1975 ; sanctionnés par le Koweït après leur soutien à Saddam Hussein en 1991 et ayant dansé de joie après le 11 septembre 2001, les Palestiniens traînent une réputation de fauteurs de troubles. D’autant plus que se glisseront parmi les malheureux Gazaouis des terroristes. Le président égyptien Al Sissi, qui s’est débarrassé de « ses » Frères musulmans, et l’Arabie saoudite aux prises avec les Houthis stipendiés par l’Iran, n’ont pas très envie de revivre l’histoire libanaise. Les Européens au grand coeur devront aussi être vigilants avant d’ouvrir grand leurs portes.

La Cisjordanie, un second Gaza ?

Quant à la solution à deux États, juif et palestinien, elle se heurte à la méfiance israélienne. Chat échaudé craint l’eau froide. Personne ne veut voir la Cisjordanie se transformer en un second Gaza, beaucoup plus vaste. Un éventuel État palestinien devrait être démocratique et démilitarisé – une double révolution dans le monde arabe. Encore faudrait-il que les jeunes Palestiniens soient, pendant au moins deux générations, éduqués à l’idée d’une coexistence avec Israël, alors qu’aujourd’hui, les cartes des écoles palestiniennes nient l’existence même de l’État hébreu et que plusieurs établissements scolaires portent le nom de terroristes. À Hébron, une école s’appelle ‘Dalal al-Mughrabi’, responsable d’une attaque ayant causé la mort de 35 personnes en Israël. À Jénine, une autre école a été baptisée en l’honneur d’Abdullah Azzam, fondateur d’Al-Qaïda.

Le chemin sera long avant la grande réconciliation, puisse-t-elle arriver un jour. À ce stade, quelques évidences :

  • Le problème palestinien est d’abord celui du monde arabe. C’est à lui d’y apporter une solution et non à l’Amérique ou à l’Europe.
  • Les monarchies pétrolières doivent prendre la main et financer la reconstruction si elles veulent stabiliser leurs relations avec Israël.
  • La Jordanie est déjà un État palestinien de fait, avec 70 % de sa population d’origine palestinienne.
  • Le Hamas ne peut pas reprendre Gaza. Pour ce groupe terroriste, la « paix » n’est qu’une trêve, et le 7 octobre un hors-d’œuvre. Il doit disparaître.
  • L’islamisme radical doit aussi être éradiqué en Cisjordanie avant même d’envisager un État palestinien.

Une nouvelle fois, le bulldozer Trump, en dépit de ses outrances, a rebattu les cartes. Il a le pouvoir de faire plier les voisins arabes d’Israël qui dépendent d’une façon ou d’une autre du géant américain. Première étape : le petit Roi de Jordanie.

Nicolas de Pape

(Photo BASHAR TALEB / AFP : Beith Lahia, nord de la bande de Gaza, 11 février 2025)

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