Le blocage des négociations actuelles à Bruxelles pourrait conduire à la piste hypothétique d’un quatrième secrétaire d’État venant gonfler le quota néerlandophone. Plausible ? Une analyse de Pascal Lefèvre, chroniqueur politique indépendant.
À la suite du véto du PS à la formation en Région bruxelloise d’une majorité incluant, du côté néerlandophone, la N-VA, la recherche d’une alternative visant à remplacer le parti nationaliste flamand par les chrétiens-démocrates du CD&V se poursuit.
Afin de satisfaire la demande du CD&V de disposer d’un secrétaire d’État, la création d’un quatrième secrétariat d’État est envisagée.
La question qui se pose dès lors est de savoir si cette piste est opportune on non.
L’article 41 de la loi spéciale relative aux institutions bruxelloises, qui organise la Région de Bruxelles-Capitale, du 12 janvier 1989, a consacré la création de « secrétaires d’État régionaux ». Le texte est clair : « Sur proposition du Gouvernement, le Parlement élit en son sein trois secrétaires d’État régionaux, dont un au moins appartient au groupe linguistique le moins nombreux selon la même procédure que celle prévue pour les membres du Gouvernement ». Le nombre de secrétaires d’État est ainsi légalement fixé à trois, dont au moins un néerlandophone.
Un équilibre linguistique délicat
Cependant, le même article stipule que « le Parlement [bruxellois] peut modifier par ordonnance le nombre de secrétaires d’État régionaux » et qu’« un tiers au moins de secrétaires d’État régionaux doit appartenir au groupe linguistique le moins nombreux ».
Une première observation s’impose : les trois postes de secrétaires d’État ont été institués à l’origine pour assurer un « rééquilibrage » en faveur des francophones, eu égard à la « surreprésentation » flamande au sein du gouvernement bruxellois, dont les secrétaires d’État ne font formellement pas partie. En effet, l’article 34 de la loi prévoit que « le Gouvernement se compose de cinq membres élus par le Parlement » et qu’« outre le Président, le Gouvernement compte deux membres du groupe linguistique français et deux membres du groupe linguistique néerlandais ».
Dans la pratique, depuis 1989, tous les Ministres-Présidents ont été francophones et il n’y a toujours eu qu’un seul secrétaire d’État néerlandophone, portant ainsi la représentation à cinq francophones et trois néerlandophones.
Une balance favorable aux néerlandophones
En cas de création d’un quatrième secrétariat d’État, l’on passerait à cinq francophones et quatre néerlandophones.
Pour une population néerlandophone en Région bruxelloise estimée à un maximum de 8% (selon les données du SPF Finances), le ratio dans la nouvelle équipe de David Leisterh s’établirait ainsi à 44% pour les Flamands.
On peut objectivement s’interroger : cette proportion est-elle raisonnable ?
Personne ne peut s’opposer à une juste représentation des néerlandophones dans la Région de Bruxelles-Capitale, mais le prix à payer pour simplement éviter la participation de la N-VA à la direction des affaires bruxelloise semble très (trop) élevé.
Même la N-VA n’en aurait pas demandé autant.
Ce serait indéniablement une défaite en rase campagne pour les francophones bruxellois, et les néerlandophones pourraient remercier le PS et brûler un cierge au CD&V.
Pascal Lefèvre, chroniqueur politique indépendant
(Photo : Belpress)