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Bouchez : « Aujourd’hui, Bruxelles devrait être entièrement repensée, il faudrait repartir de zéro »

par Demetrio Scagliola
Georges-Louis Bouchez, Président du Mouvement Réformateur, lors d’une interview exclusive pour 21News.

Du dernier étage du siège du MR, Georges-Louis Bouchez a une vue imprenable sur la capitale  et sur le Palais de Justice. Cela tombe sous le sens, Bruxelles flambe de toutes parts : au niveau financier, au niveau sécuritaire et au niveau politique. Ces défis, GLB entend les prendre à bras le corps avec volontarisme, énergie et le côté bulldozer qui le caractérise. Wallonie, Arizona, RTBF, culture, syndicats, PS ou extrême-droite… Dans cette grande interview sans tabou, le président du MR passe en revue les grands dossiers politiques en cours, en n’épargnant personne. Attachez vos ceintures…

21News : Bonjour Georges-Louis Bouchez. Qu’est-ce qui vous inquiète le plus aujourd’hui à Bruxelles ? La crise politique ou la flambée de la criminalité ?

Georges-Louis Bouchez : Les deux sont liés. Je pense que ce qui est le plus inquiétant aujourd’hui à Bruxelles, c’est Bruxelles elle-même. On est dans une région en situation budgétaire dramatique : 1,6 milliard de déficit sur un budget de sept milliards, c’est colossal.

En parallèle, il y a une criminalité préoccupante. L’idée selon laquelle celle-ci ne relèverait que des ministres de l’Intérieur et de la Justice est un peu facile. En réalité, la manière dont Bruxelles a été gérée ces dernières années a favorisé cette criminalité. On a ouvert des maisons de quartier et des maisons de jeunes, mais sans vouloir aller dans certains quartiers ou fermer certains commerces qui servent de blanchiment d’argent. Les politiques sociales ont concentré des personnes dans des logements spécifiques, et aujourd’hui, on retrouve même des armes dans ces logements sociaux.

« On ne sait même pas qui habite dans certains logements »

On n’a pas voulu voir le danger de l’islamisme, parce qu’il fallait gagner des voix. Des textes complètement lunaires ont été votés au Parlement pour faire plaisir à un certain électorat. Tout cela mis bout à bout a engendré la situation actuelle.

Un des plus grands problèmes aujourd’hui à Bruxelles, c’est qu’on ne sait même pas qui habite réellement dans certains logements. C’est un énorme problème pour lutter contre la criminalité. Cette responsabilité incombe à la gestion communale et régionale. Prenons l’exemple de Molenbeek, où il était impossible pour les policiers locaux de mener des contrôles fiscaux dans certains établissements. C’était tout simplement interdit.

Ajoutons à cela l’aspect socio-économique, tout aussi dramatique. Aujourd’hui, Bruxelles devrait être entièrement repensée, il faudrait repartir de zéro, car il n’y a presque plus rien qui fonctionne en raison des choix politiques qui ont été faits. À mon sens, une des grandes réformes nécessaires est institutionnelle : il faut réduire le nombre d’élus. Il y a 805 élus directs, et si on additionne tous ceux qui sont nommés à gauche et à droite, on se retrouve avec un système qui ressemble à une république bananière.

« On fait élire des gens sur des débats comme Gaza »

21News: La crise politique n’aide évidemment pas à reconstruire un projet. Vous dites qu’il faudrait tout reprendre à zéro, mais si vous devez partir avec le PS, ce sera compliqué d’y parvenir.

G.-L. B. : Le PS doit prendre ses responsabilités. Sinon, tôt ou tard, Bruxelles fera face à des difficultés de financement et se tournera vers le fédéral. À ce moment-là, les réformes viendront de l’extérieur. Je pense que cette option ne sera plus un tabou.

Aujourd’hui, il faut reconnaître qu’une partie de la classe politique bruxelloise n’a ni la volonté ni la capacité de réformer la région. Pourquoi ? Parce qu’on fait élire les gens sur des débats comme Gaza. Allez voir les 89 députés bruxellois, je ne suis pas certain que la moitié d’entre eux connaisse le niveau actuel du déficit. On les élit sur Gaza, le voile ou l’abattage, et ensuite, on se retrouve avec une situation inextricable.

21News: David Leisterh a fait un pas de côté. A-t-il échoué dans sa mission de formateur ?

G.-L. B. : Non, clairement pas. Je pense que personne n’aurait pu faire autrement. Pour ma part, dès la deuxième réunion, j’ai compris que ça n’irait pas plus loin. Soit le PS se ressaisit et comprend que son attitude, proche de celle de La France Insoumise ou du PTB, va lui porter préjudice, soit il continue dans cette voie et Bruxelles s’effondrera totalement. Dans ce cas, une gestion extérieure deviendra inévitable. C’est extrêmement compliqué d’avancer. Il faut prendre en compte le signal envoyé par les électeurs. D’ailleurs, je suis convaincu que si le conflit à Gaza n’avait pas eu lieu, le résultat aurait été encore plus dur pour la gauche.

Quand j’entends certains compter les voix du PTB pour dire que la gauche reste majoritaire, ça me fait sourire. Imaginez si la droite faisait pareil en comptant toutes ses voix additionnées… On nous tomberait dessus immédiatement. Pour moi, les voix extrêmes, qu’elles viennent du PTB ou du Vlaams Belang, sont des voix neutralisées. Mais au PS, ils ne raisonnent pas comme ça.

Ce qui est terrible, c’est de se dire que c’est Gaza qui a permis à la gauche de maintenir un certain niveau électoral. Peut-être que l’avenir de Bruxelles passera par le jour où le Hamas commencera à s’inquiéter du déficit budgétaire bruxellois… Peut-être que c’est ce qu’ils attendent.

« Nous allons mettre en œuvre un plan de nettoyage de Bruxelles »

21News: Vous parlez d’une intervention extérieure si la situation reste bloquée. L’électrochoc sécuritaire que vous appelez de vos vœux pour Bruxelles pourrait-il aussi passer par cette intervention ?

G.-L. B. : Oui, mais cette gestion extérieure est déjà en cours. Nous allons mettre en œuvre un plan de nettoyage de Bruxelles, qui est en réalité une version renforcée du plan Canal. Nous allons déjà nous substituer à certaines compétences.

Par exemple, la gestion de l’état-civil et de la population est normalement une compétence communale. Nous allons nous y substituer pour vérifier les domiciles et s’assurer que les gens résident bien là où ils le déclarent. En matière de police, nous allons pallier les défaillances des zones locales qui ne sont pas en mesure d’assurer leur mission. Nous avons déjà débloqué plusieurs enquêteurs à la police judiciaire fédérale, car il manque d’enquêteurs dans certaines zones comme la zone 12.

J’entends le bourgmestre d’Anderlecht s’agiter, mais il devrait d’abord regarder la manière dont il a géré les effectifs de sa propre zone de police. C’est un exemple clair d’une gestion déficiente à laquelle nous devons nous substituer.

Troisième aspect : les fermetures d’établissements problématiques. C’est une compétence des bourgmestres, mais comme ils ne l’exercent pas correctement, le fédéral va devoir intervenir par d’autres moyens de contrôle.

Quand vous additionnez tout cela, la gestion de la sécurité va déjà passer par une substitution de compétences. Ce n’est même pas une mise sous tutelle, mais bien une prise en main directe par un autre niveau de pouvoir.

Un vrai plan de lutte contre la criminalité organisée

21News : Et concernant la gestion des polices locales et des zones de police ?

G.-L. B. : Là aussi, la fusion des zones de police constitue une reprise en main. Il n’y aura plus qu’un seul chef de police pour l’ensemble de la région.

J’en discutais encore hier avec des élus locaux bruxellois. L’un d’eux, qui était initialement opposé à cette fusion, m’a avoué qu’il avait changé d’avis après avoir constaté que nombre d’élus locaux ne comprennent rien aux enjeux de sécurité. Ils ne sont pas du tout au fait de ces questions, et il vaut donc mieux qu’une zone unique soit dirigée par un véritable professionnel de la sécurité.

L’idéal serait d’avoir un chef de police en contact direct avec un procureur du Roi et que ces deux acteurs, sous l’égide de la justice, déploient une véritable stratégie de lutte contre la criminalité organisée. Ce serait beaucoup plus efficace que de confier cette responsabilité à plusieurs bourgmestres qui, au final, protègent jalousement leurs effectifs sans avoir une vision globale des enjeux de Bruxelles.

Nous devons mettre en place un dispositif structuré et efficace, à l’image de ce qui se fait à Anvers, où la criminalité baisse chaque année.

21News : Concrètement, quand ce plan sécuritaire sera-t-il visible sur le terrain ?

G.-L. B. : Certains aspects sont déjà en place, notamment le renforcement des effectifs policiers. Pour le reste, cela se fera de manière progressive. Il n’y aura pas un jour précis où tout basculera, mais une montée en puissance graduelle.

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