Ronald Reagan reste l’un présidents américains les plus populaires. De Hollywood à Washington, le parcours de l’acteur qui a fait tomber l’URSS se décline sous forme d’une BD qui n’est pas exempte de qualités. Ni d’aprioris. « Le crétin qui a gagné la guerre froide ». La critique de Lode Goukens.
Ce n’est pas le genre d’œuvre auquel on s’attendrait immédiatement. C’est même assez inhabituel. Difficile à cataloguer, donc, mais mon avis est positif. Cependant, le lecteur devra surmonter quelques obstacles.
Tout d’abord, il y a le classique dédain français envers les Américains. Ensuite, le ton est très critique, parfois même condescendant, comme c’était souvent le cas à gauche pendant le mandat de Reagan. Pourtant, après lecture, ces aspects ressemblent davantage à des artifices. Comme le suggère le titre, Reagan a gagné la guerre froide, ce qui rend ce portrait d’autant plus intéressant.
Le scénario a été écrit par Jean-Yves Le Naour, tandis que Cédrick Le Bihan s’est occupé du dessin et de la mise en couleur. Comme la plupart des dessinateurs modernes, Le Bihan travaille sur ordinateur.
Une représentation fidèle de Ronald Reagan
Le scénario offre un portrait fidèle de Ronald Reagan en tant que président américain, avec ses forces et ses faiblesses. Il suit une chronologie historiquement correcte et respecte les faits. Le scénariste jongle habilement avec les blagues qui ont fait la renommée de Reagan, lesquelles restent toujours efficaces aujourd’hui et apparaissent même fréquemment sur les réseaux sociaux, comme X.
Le scénariste joue avec les préjugés du lecteur sur cet important président américain. En réalité, on ne sait jamais s’il considère Reagan comme un clown ou comme un communicateur et un homme d’État génial. Cette ambiguïté rend le scénario encore plus intéressant. Bien sûr, la bande dessinée ne devient jamais flatteuse, ce qui est probablement pour le mieux.
Un style graphique qui demande une adaptation
Le style de dessin et le découpage de l’histoire exigent un petit effort initial du lecteur. Toutefois, une fois immergé, les 62 pages de la bande dessinée se lisent à toute allure.
Concernant le style graphique, Le Bihan alterne entre dessins réalistes et semi-réalistes, souvent pour créer un effet comique. C’est une trouvaille agréable. Cependant, dans les passages réalistes, qui couvrent la majeure partie de l’histoire, les visages et surtout les expressions ne ressortent pas toujours comme il le faudrait. Un choix plus radical en faveur de visages légèrement caricaturaux aurait pu être plus cohérent. Peut-être le dessinateur s’est-il appuyé un peu trop fidèlement sur des vidéos et photos des années 1980, bien que cela ne signifie pas qu’il ait fait du tracing.
La plupart des personnages historiques sont reconnaissables, bien que le style réaliste puisse parfois compliquer les choses par rapport à des caricatures. Cela semble être un choix artistique, car Le Bihan maîtrise plusieurs styles, comme il l’a démontré auparavant avec des bandes dessinées inspirées du manga japonais ou dans un style poétique avec des animaux anthropomorphes rappelant des livres pour enfants.
Il est probable que ce choix de style réaliste ait été motivé par une crainte de manquer de crédibilité. Après tout, il s’agit d’une bande dessinée historique visant une non-fiction avec une touche d’humour authentique, mettant en scène des personnages réels et bien connus.
Conclusion
Cette bande dessinée s’avère extrêmement intéressante et mérite d’être lue, notamment par les amateurs de politique internationale ou d’histoire. C’est une œuvre qui, malgré quelques défis, offre le portrait captivant d’un président qui a marqué son époque.
Lode Goukens