La Belgique doit repenser en profondeur sa place dans le nouvel échiquier européen de la défense. C’est l’appel lancé lundi par le think tank Itinera Institute, qui met en garde contre une approche uniquement budgétaire de la question sécuritaire, et plaide au contraire pour une vision stratégique à long terme. Comme pour le vieillissement démographique, le risque est de courir derrière les urgences sans penser en amont.
Itinera estime que la défense ne se résume pas à des dépenses militaires : elle peut devenir un levier d’innovation industrielle, de croissance économique et de résilience collective. À condition de s’appuyer sur une société robuste et confiante, dans laquelle pouvoirs publics, entreprises, universités et citoyens collaborent étroitement. L’évaluation en cours de la Stratégie nationale de sécurité offre un moment idéal pour opérer ce changement de cap.
La Belgique à la traîne
Alors que d’autres pays européens augmentent fortement leurs budgets de défense, certains visant 3 % du PIB, la Belgique reste à la traîne. Ce retard met en péril son positionnement stratégique comme terre d’accueil de nombreux sièges internationaux, notamment ceux liés à l’OTAN et à l’UE. À l’inverse, rattraper ce retard permettrait de valoriser des atouts indéniables : infrastructures portuaires, industrie locale, implantation de grandes entreprises internationales.
Financer autrement la sécurité
Consciente des contraintes budgétaires liées à la dette publique, au vieillissement et à la transition énergétique, Itinera propose des mécanismes innovants de financement :
- Coopération européenne pour mutualiser la dette liée à la défense
- Création d’obligations de résilience pour mobiliser l’épargne des Belges
- Mise en place d’un fonds national ou européen d’investissement en défense
Itinera plaide également pour un pacte de défense, réunissant l’État, l’industrie et le secteur financier afin de stimuler les investissements privés dans le domaine. Cela suppose aussi un recentrage de la stratégie des participations publiques vers le long terme, sans brader les actifs de l’État.
Investir avec intelligence et coordination
Il ne suffit pas de dépenser plus : il faut investir mieux. Itinera insiste sur la nécessité d’un Sommet national de la défense, interfédéral, chargé de fixer les priorités d’investissement :
- Soutenir la reconstruction de l’Ukraine avec des retours économiques
- Respecter les engagements pris envers l’OTAN
- Participer à l’émergence d’une véritable industrie européenne de la défense
- Soutenir les entreprises belges du secteur pour en faire des champions continentaux
- Protéger les infrastructures critiques et la sécurité économique
Moins de moyens consacrés au personnel, plus à la technologie, à l’innovation duale et à la sécurité des chaînes d’approvisionnement : telle est la ligne de conduite défendue par Itinera. Encore faut-il lever les obstacles bureaucratiques qui empêchent de dépenser rapidement et efficacement.
Conclusion sans ambiguïté : « La défense est aujourd’hui une nécessité géopolitique mais aussi une chance économique. La Belgique doit faire des choix clairs, maintenant. Le temps presse. »
La rédaction
(Photo Belgaimage)
