Gilles Gaetner, lui-même journaliste d’investigation et qui connaît bien son objet d’étude, publie sous la forme d’une lettre ouverte à Edwy Plenel : « Pour qui roule Mediapart/La face cachée d’Edwy Plenel » (Fayard). Tout en reconnaissant le talent du fondateur de Mediapart, il égrène l’ensemble de ses dérives. Il regrette la longue liste des « victimes » du célèbre journaliste, de François Mitterrand à Nicolas Sarkozy. Gaetner affirme que Plenel s’assied allègrement sur la présomption d’innocence et confond parfois le vrai et le vraisemblable.
21News : Chez nous comme en France, Edwy Plenel est un peu considéré comme un héros par les jeunes journalistes. Dans les facultés, on le présente comme un modèle. Mais à vous lire, on a plutôt l’impression que c’est un exemple à ne pas suivre, non ?
Gilles Gaetner : Oui, c’est votre avis, mais je le partage. Edwy Plenel est devenu une sorte de porte-étendard pour la jeune génération. Les temps changent : il y a trente ans, c’était le service étranger du Monde qui faisait rêver. Aujourd’hui, c’est Mediapart. C’est une aventure intéressante, bien sûr. Mais la promesse initiale de faire un site indépendant, qui pratique un journalisme rigoureux sans acharnement, a disparu. Il y a eu beaucoup de sorties de route.
Plenel, que je reconnais comme un homme intellectuellement brillant, s’est égaré à plusieurs reprises. C’était déjà le cas au Monde, et avant ça au journal Rouge, organe de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR). Aujourd’hui encore avec Mediapart, certains l’accusent de pratiquer un journalisme d’acharnement, de transformer les enquêtes en matchs de boxe. On est dans un journalisme engagé, qu’il revendique d’ailleurs. Mais ça pose question.
21News : C’est ce que vous lui reprochez en tant que confrère ?
G.G. : Il fait ce qu’il veut. La liberté d’expression, on en parle tout le temps, mais on est toujours « le fasciste ou le gauchiste » de quelqu’un… En France en tout cas. Mais certaines erreurs lui collent à la peau. Par exemple, quand il avait vingt ans, à la LCR, il a soutenu les terroristes palestiniens responsables du massacre de onze athlètes israéliens aux JO. Il a reconnu une « erreur de jeunesse », mais bon…
Moi je rétorque que certains, à vingt ans, se comportaient en héros. Je pense à Daniel Cordier, issu d’une famille maurrassienne antisémite, mais qui a rejoint la Résistance. Ou à Roger Planchon, décoré à 13 ans pour faits de Résistance. On peut se tromper, mais Plenel a du mal à reconnaître ses erreurs. Dans son livre sur Rouge, il explique que « des intellectuels ont soutenu la cause palestinienne », en citant Sartre. Mais faire de Sartre un héros, c’est risible. Pendant l’Occupation, il jouait les collabos à sa manière.

Pour les musulmans
21News : Aujourd’hui encore, il affiche un tropisme pro-palestinien. Il soutient presque de façon caricaturale les musulmans, le port du voile aux JO, etc. C’est une continuité avec son passé ?
G.G. : Votre question est pertinente. Oui, je pense qu’il y a une forme de continuité. Il a été marqué par la guerre d’Algérie, durant son enfance en Algérie, avec son père. Il voit dans la cause palestinienne une prolongation du combat pour l’indépendance algérienne. C’est comme ça que je l’interprète.
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