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Fusillades à Anderlecht : pourquoi Bruxelles a besoin d’un gouvernement solide pour lutter contre les narco-trafiquants

par Demetrio Scagliola

Les fusillades des derniers jours à proximité de la station de métro Clemenceau à Anderlecht auraient-elles eu lieu si la Région bruxelloise avait une majorité et un gouvernement de plein exercice ? Sans doute. Mais dissocier totalement le blocage politique bruxellois de l’impunité et de la violence aveugle des soldats des narco-trafiquants, comme le font de nombreux observateurs, c’est faire preuve de mauvaise foi et de superficialité politiques. Car partout dans le monde, les cartels de la drogue et les mafias s’installent et prospèrent là où les pouvoirs et les institutions sont faibles, disloqués, corruptibles, et où les moyens accordés à la Justice, aux enquêteurs et aux services de police trop faibles.

Aujourd’hui, pour les barons de la drogue qui gèrent le trafic international, la Belgique est considérée comme un maillon faible. Alors bien sûr, on ne va pas comparer Bruxelles et Anvers à Medellín (Colombie) ou Tijuana (Mexique), mais l’augmentation vertigineuse des faits de violence, de fusillades, et d’exécutions sommaires dans nos métropoles doit nous alerter. De nombreux experts – et même les magistrats spécialisés dans la lutte contre la grande criminalité organisée – ont souvent tiré la sonnette d’alarme : les narco-trafiquants, parce qu’ils brassent des intérêts financiers gigantesques, représentent peut-être aujourd’hui la plus grande menace pour nos démocraties.

Leurs armes sont connues : corruption et intimidation. Doit-on rappeler qu’un des derniers ministres de la Justice belge – Vincent Van Quickenborne – a dû vivre sous protection policière rapprochée et même être caché dans un bunker avec sa famille pendant un mois après avoir reçu des menaces considérées comme sérieuses ?

La Belgique, maillon faible du trafic international

Bref, la menace est sérieuse et l’implantation de ces cartels dans nos grandes villes déjà très avancée. Dans notre monde politique, nul ne connaît mieux l’ampleur du problème que notre nouveau Premier ministre, Bart De Wever. Comme bourgmestre d’Anvers, De Wever a été le témoin privilégié de la montée inexorable des cartels dans le pays. Au départ d’Anvers, première porte d’entrée européenne du trafic de drogue, cela s’est répandu comme une tache d’huile dans toutes les grandes villes du Royaume, et notamment à Bruxelles, où la guerre des gangs de la drogue s’invite régulièrement dans le quotidien des habitants de la capitale.

Cette guerre contre les « narcos » sera longue, difficile et coûteuse. Elle nécessitera des investissements importants dans la justice, dans les nouvelles technologies d’investigation et dans les zones de police. Elle exigera des collaborations avec les enquêteurs européens et ceux des pays producteurs de drogue, partout dans le monde. Mais, point crucial, elle demandera une stratégie commune de toutes nos institutions : fédérales, régionales et communales. Pour que les moyens soient ciblés, et pour que l’on cesse, comme on l’a encore entendu ces dernières heures, de se renvoyer la responsabilité entre niveaux de pouvoir.

Le blocage politique : un frein à la lutte contre les cartels

C’est aussi pour cette raison qu’il devient urgent que Bruxelles, au cœur du problème aujourd’hui, se dote enfin d’une majorité régionale, comme le roi Philippe l’a souhaité dans son discours aux corps constitués. On ne reviendra pas sur les problèmes budgétaires, démographiques, de chômage et de mobilité que connaît Bruxelles. Mais l’impunité avec laquelle les cartels manifestent leur violence et leur pouvoir dans des lieux publics doit sonner comme un signal d’alarme. Il est plus que temps que les partis cherchent une solution pour pouvoir travailler avec le fédéral sur un vrai plan de lutte contre les mafias de la drogue. La fusion des zones de police, qui fait tant réagir les bourgmestres et les partis d’opposition (au fédéral), ne peut pas devenir un prétexte de plus au blocage. La multiplication actuelle des zones et la dilution du pouvoir sur le terrain n’ont pas démontré leur efficacité, bien au contraire.

Ce qui doit alerter les bourgmestres bruxellois aujourd’hui, ce n’est pas la perte d’une petite partie de leur pouvoir sur les zones de police, mais bien l’angoisse et l’insécurité qui tétanisent de nombreux habitants et qui ruinent la réputation de notre capitale.

Or, aujourd’hui, le blocage politique bruxellois ressemble de plus en plus à une pièce de théâtre médiocre jouée par de mauvais acteurs. Entendre Zakia Khattabi (Ecolo) prétendre ce jeudi matin dans une interview, sans apporter de preuves tangibles, que le véritable objectif de certains est d’écarter le PS du pouvoir à Bruxelles, prouve au moins une chose : alors que la situation bruxelloise se dégrade à vue d’œil jour après jour, certains protagonistes préfèrent rester dans le bac à sable plutôt que de sortir la capitale de ses énormes problèmes.

Demetrio Scagliola

(Photo Belga : Hatim Kaghat)

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