Membre du conseil d’administration de BECI, du club The Merode, et du WWF Belgique entre autres, Herman Craeninckx, avocat d’affaires et de restructurations, est depuis des années un observateur et acteur de la vie socio-économique et politique à Bruxelles.
21News : Commençons si vous le voulez bien par l’avenir de la Région bruxelloise. Que vous inspirent les derniers développements en la matière ?
Herman Craeninckx : Je pense que l’une des raisons pour lesquelles on tourne en rond est liée au fait que le Belge, et le Bruxellois, ne sont pas des révolutionnaires. Nous n’avons pas connu, comme en France, par exemple, de révolutions et donc, le Belge ne descend pas dans la rue. Il est y descendu, il y a vingt ans, une fois, dans le cadre de l’affaire dite de « Julie et Melissa », mais c’était avant tout pour des raisons qui tenaient à la sécurité de nos enfants.
Nous ne sommes donc jamais descendus dans la rue pour des raisons politiques. Dans les restaurants, dans les cafés, certes, on discute le coup et on râle, mais on ne descend jamais dans la rue. Je pense que là où cela devient problématique, c’est que nos politiciens sont bien conscients de cela, et donc vivent avec un certain sentiment d’impunité.
« Le manque d’appétence des citoyens belges à descendre dans la rue aboutit à un certain sentiment d’impunité de la classe politique »
Je suis arrivé à ce constat parce que je ne comprends pas, après examen, que l’on puisse se comporter de la sorte, en l’espèce, de ne pas être capable de former un gouvernement dans un délai raisonnable. La classe politique, en substance, se dit : « peu importe ce que l’on fait ou ce que l’on ne fait pas, de toute façon, cela va passer. » Parce que sinon, je ne peux pas m’expliquer comment, dans une démocratie, on arrive à adopter de tels comportements. C’est là donc un premier constat que je pose : celle du sentiment d’impunité de la classe politique au regard d’une certaine apathie citoyenne.
Un deuxième constat concerne Bruxelles. J’ai pris la peine, ces derniers jours, de lire les programmes de tous les partis pour Bruxelles, en tout cas pour ce qui concerne les partis réputés « hors des extrêmes ». J’ai passé un certain temps à lire l’ensemble des programmes des partis dits « démocratiques ». Prenons par exemple le programme de la N-VA. Je vois que l’on y met l’accent sur la sécurité, sur la mobilité, sur la propreté, sur l’éducation, et, puisque Bruxelles est une capitale bilingue, l’on met également l’accent sur la pratique du néerlandais. Je me dis en lisant ce programme, au regard de ce qu’il contient, que l’on ne peut pas décemment s’opposer à ce genre de partis, dont les idées telles qu’affichées constituent un programme dans l’intérêt du citoyen.
« Je pense qu’en réalité les partis exportent à Bruxelles le débat fédéral, et peut-être les frustrations au niveau fédéral inhérentes à certains partis »
Je me suis demandé pourquoi il y avait dans le chef de certains une opposition si systématique à la N-VA. En fait, je pense que cela n’a rien à voir avec Bruxelles. En réalité, les partis exportent à Bruxelles le débat fédéral. On essaye donc d’exporter à Bruxelles les divergences qui trouvent leur origine au niveau fédéral. Or Bruxelles, c’est un tout autre enjeu, ce n’est pas un enjeu fédéral, ou au moins pas directement. Ce constat m’attriste.
21News : La classe politique serait donc devenue quelque peu « dogmatique » ?
Dans une démocratie, et dans tout autre système politique d’ailleurs, ou du moins en théorie, le bien-être du citoyen doit primer et doit constituer le centre de toutes les préoccupations. Or, ce que l’on constate, c’est que certains partis sont et restent très dogmatiques, effectivement. Ceci de sorte que l’on se retrouve en face d’une discussion qui n’est plus dans l’intérêt du citoyen mais qui trouve ses origines dans des positions « de principe ». Cela, c’est grave, dans la mesure où dans le genre de contexte, la démocratie laisse presque place à une dictature. Nous glissons donc ici vers un débat idéologique et dogmatique plutôt qu’un débat dans l’intérêt de la communauté.
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