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La situation budgétaire de la Région bruxelloise devient de plus en plus dramatique

par Lode Goukens

Le budget de la Région de Bruxelles-Capitale menace de dérailler, au point que le gouvernement fédéral pourrait être amené à en prendre le contrôle. Pendant ce temps, le train file tout droit vers le précipice. Dernière révélation en date : l’explosion des coûts liés au personnel.

Au cours de la dernière législature, les dépenses de personnel de la Région ont augmenté de près de 50 %, passant de 1,2 milliard à 1,8 milliard d’euros. Cette hausse s’explique notamment par l’embauche de 5 000 fonctionnaires entre le début de 2019 et la fin de 2023.

Ces statistiques sont introuvables auprès du BISA (Institut bruxellois de statistique et d’analyse). C’est un politicien libéral, Frédéric De Gucht, président de l’Open VLD Bruxelles, qui a discrètement dévoilé ces chiffres. Dans une interview au quotidien De Standaard, il a déclaré : « Ces cinq dernières années, le nombre de fonctionnaires bruxellois a augmenté de près de 34 %. » Une hausse d’un tiers, donc.

Des données budgétaires bien cachées

Ce qui frappe dans cette déclaration, c’est qu’elle est difficilement vérifiable. La Région bruxelloise ne semble pas tenir ni publier ces données de manière adéquate. De Standaard a ainsi parlé d’une « énorme pieuvre bruxelloise », en référence à la célèbre série italienne sur la mafia, La Piovra.

Le tentacule le plus imposant est celui de la société de transports bruxelloise STIB. Sous l’impulsion de Groen et d’Ecolo, le nombre d’employés est passé de 8 798 en 2018 à 10 407 fin 2023. Parallèlement, le nombre de voyageurs a diminué.

D’autres tentacules incluent le service de collecte des déchets et Actiris, l’organisme pour les demandeurs d’emploi. Là, le personnel a doublé, ce qui ne manquera pas d’étonner les Bruxellois face à l’état de propreté des rues et des espaces publics.

De nouveaux tentacules continuent de se développer. Parmi eux, un service de sécurité appelé Safe ou encore Paradigm, l’opérateur régional pour la transition numérique. Le directeur de Paradigm, Nicolas Locoge, a récemment fait la une pour une procédure disciplinaire : il aurait joué au golf pendant ses heures de travail et déclaré pour 70 000 euros de matériel de golf en frais professionnels. Sa sanction ? Une retenue de 10 % sur son salaire, tout en restant à la tête de ses 663 employés.

En tout, le nombre de fonctionnaires régionaux est passé de 17 694 en 2018 à 22 806 en 2023, soit une augmentation de 29 %. Ce chiffre n’inclut pas encore les recrutements prévus pour l’année électorale 2024. Sans compter les effectifs de la STIB, la hausse atteint même 39 % en cinq ans.

Pour le budget de la Région bruxelloise, c’est catastrophique

La situation est d’autant plus alarmante que, sous l’effet de l’indexation due à l’inflation, les coûts salariaux des fonctionnaires bruxellois explosent déjà. À cela s’ajoutent encore les augmentations barémiques.

David Leisterh (MR), formateur bruxellois, a justement parlé d’un « défi budgétaire immense ». Avec 6,5 milliards d’euros de recettes, la Région de Bruxelles-Capitale dépense chaque année 7,8 milliards d’euros. Un quart de ce montant est absorbé par les coûts du personnel.

Cette situation dramatique a plusieurs responsables, mais un seul gardien : l’ancien ministre bruxellois de la Fonction publique et du Budget, Sven Gatz (Open VLD). Ce dernier, qui cumulait ces deux portefeuilles, a souvent minimisé la gravité des choses. En 2024, il a tenté d’introduire un gel des recrutements, présenté comme une mesure d’économies. Pendant dix mois, la Région bruxelloise ne devait plus engager aucun fonctionnaire, même pour remplacer des départs à la retraite ou des démissions. Cette initiative devait permettre d’économiser 35 millions d’euros. Une belle intention, en apparence…

Entre-temps, le nouveau président de son parti et négociateur pour la formation du gouvernement bruxellois, Frédéric De Gucht, a déclaré dans La Libre Belgique : « Les finances de la Région bruxelloise sont dans un état critique qui met en péril son avenir. » De Gucht, qui dirige les négociations du côté des libéraux flamands, se positionne comme un « bleu foncé ». Sven Gatz, pour sa part, a quitté la scène pour « raisons de santé ». Une expression euphémique, car tout le monde en politique belge sait ce que cela signifie. Selon la morale politique belge, ces problèmes relèvent de la sphère privée. Sur le plan idéologique, De Gucht est beaucoup plus proche de Leisterh que de Gatz, dont les positions assez à gauche le rapprochent ouvertement du PS, tout comme un autre ancien ministre libéral du Budget, Guy Vanhengel (Open VLD).

La dette de la Région bruxelloise approche les 240 %. Pour De Gucht, dans une telle situation, on ne peut plus parler d’une « entité souveraine ». La Région devra compter sur l’intervention du gouvernement fédéral pour garantir son financement. « Nous aurons besoin de quelqu’un d’autre pour co-signer nos prêts avec nous », a-t-il déclaré.

Et cela, sans même aborder la question des intérêts. « Si cette charge dépasse 8 % du budget total – soit 480 millions d’euros –, nous serons confrontés au même problème », a averti De Gucht.

Il a toutefois refusé d’imputer la responsabilité à ses deux collègues de parti qui ont géré le budget lors des législatures précédentes. Le président local a préféré pointer du doigt l’ensemble du gouvernement. Cela n’efface pas pour autant le fait que la Cour des comptes refuse depuis des années d’approuver les comptes de la Région bruxelloise, jugeant qu’ils sont en désordre.

Lode Goukens

(Photo Belgaimage : le gouvernement bruxellois à la présentation de son budget 2023)

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