Johny Vansevenant (né en 1958) est ce qu’on appelle une voix emblématique en Flandre. De 1988 jusqu’aux élections de juin dernier, il a été journaliste à la radio publique flamande, notamment en tant que correspondant politique pour Radio 1. Chaque Flamand connaît le ton calme et distinctif de ce journaliste radio. Témoin privilégié, Vansevenant a écrit un ouvrage d’une ampleur biblique : La lutte pour le pouvoir. Ma vie dans la Wetstraat. Un livre de 624 pages où chaque politicien a sans doute feuilleté l’index pour voir ce qu’il disait de lui.
21News : Vous décrivez votre livre comme un portrait de la fin de l’État CVP.
Johny Vansevenant : La fin de l’État CVP coïncide en réalité avec la fin du pilier catholique. Autrefois, on restait fidèle à son pilier de la naissance à la tombe. Si vous étiez issu d’un foyer catholique, vous votiez pour le CVP, vous adhériez à l’ACV (syndicat chrétien), ou encore à la CM (mutuelle chrétienne), etc. Le ciment de ce système, c’était la foi.
Mais cette foi s’est effritée, bien sûr. Et puis, il y a eu le coup dur de la crise de la dioxine en 1999. Le système était le suivant : le CVP fonctionnait comme une forme de gouvernement autonome avec ses propres structures. Il alternait deux mandats avec les socialistes, puis deux mandats avec les libéraux.
21News : Vous avez commencé à couvrir la politique à un moment où ce basculement s’amorçait ?
J. V. : Oui, c’était lors des élections remportées par le PS avec José Happart. Une coalition avec les libéraux était encore possible, mais de justesse, avec une majorité de deux sièges. On pouvait encore envisager une coalition « bleu-romaine » (libéraux et catholiques). Comme le CVP avait une aile gauche et une aile droite, le basculement était fréquent.
Guy Verhofstadt n’a jamais pu digérer cela. Dans mon livre, je le cite : « Le soir, je pensais encore former un gouvernement avec Wilfried Martens et le CVP, et le matin, j’entends à la radio qu’ils nous laissent tomber pour s’allier avec les socialistes. » Depuis lors, Verhofstadt a nourri un rejet durable envers les démocrates-chrétiens. Selon lui : « Avec des gens difficiles, on peut conclure un accord, mais avec des gens peu fiables, c’est impossible. » Dès lors, il s’est mis en quête d’une coalition anti-CVP.
Il a renforcé le PVV (prédécesseur de l’Open VLD) en le droitisant, attirant l’aile droite du nationalisme flamand, mais aussi celle du CVP. Cela a donné des résultats.
Cependant, une fois au pouvoir, il a dû gouverner avec les socialistes et les écologistes. Les questions éthiques ne posaient pas de problème, mais lorsque les socialistes, soutenus par le PS, ont pris de l’ampleur, ils n’ont plus eu besoin des écologistes. La facture est arrivée rapidement : les socialistes exigeaient davantage, notamment le droit de vote communal pour les migrants. Cela a provoqué une révolte de l’aile droite du VLD.
Entre-temps, Yves Leterme (CD&V) se préparait, avec son cartel formé avec la N-VA, à occuper l’espace et à rallier toute cette aile droite.
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