Critiqué, défié, traîné en justice, Donald Trump obtient par sa victoire électorale massive une revanche significative face aux élites de Washington et même d’Europe. Analyse.
L’hostilité envers Donald Trump est souvent intense, presque caricaturale. Mais ce genre de traitement réservé aux Républicains n’est pas nouveau. Ronald Reagan, par exemple, autrefois qualifié d’« acteur raté », fut également pris pour cible, avant d’être reconnu pour sa contribution à la chute du communisme soviétique. George Bush père, ancien directeur de la CIA, fut aussi attaqué, tout comme son fils, George W. Bush, souvent moqué pour ses supposées faiblesses académiques et comparé sur l’internet naissant à un primate. Être du côté démocrate semble souvent plus sûr pour conserver les bonnes grâces de la presse. Souvenons-nous des huit ans d’Obamania.
En vérité, le « Trump bashing » commence dès les primaires républicaines de 2015. À la lecture des dépêches d’agences de presse (AP, AFP, Reuters), on perçoit un parti pris certain : Trump est décrit par des qualificatifs variés comme « milliardaire », « richissime », « magnat de l’immobilier », « fantasque », « populiste », « trublion », tandis qu’Hillary Clinton est désignée par des titres tels qu’« ancienne Première Dame », « ancienne sénatrice », ou encore « ancienne Secrétaire d’État ».
Le choix des mots. Mais aussi le choc des photos : Trump apparaît souvent dans des postures où son expression semble tendue, voire grimaçante, accentuant le contraste avec ses adversaires.
La caricature de Trump, envers et contre tout
L’assurance de certains médias de sa défaite semble totale. En 2016, l’AP va jusqu’à écrire : « La capacité de Donald Trump à diviser, son incompétence, ses imprudences et son impopularité record risquent de transformer cette élection en raz-de-marée démocrate. » Les « experts » de la lettre spécialisée Sabato’s Crystal Ball de l’université de Virginie, prédisent une victoire facile avec 347 grands électeurs pour Hillary Clinton, contre 191 pour Donald Trump ! Et pourtant, contre toute attente, Trump remporte l’élection.
Suite à sa victoire, les critiques persistent. Wall Street « lutte pour ne pas céder à la panique ». Mais la bourse ne cessera de monter ensuite. Certains, ébranlés par ce zozo devenu président, vont même jusqu’à envisager une intervention étrangère comme explication. Ainsi naît l’hypothèse du « Dossier russe », suggérant que des hackers russes auraient aidé Trump. Promue par de nombreux médias pendant plus de deux ans, cette hypothèse n’a pas été corroborée par les conclusions de l’enquête de Robert Mueller. En 2023, la Columbia Journalism Review revient sur les erreurs médiatiques autour du Russiagate, relevant que des faits ont souvent été amplifiés pour dénigrer Trump. Celui-ci confiera d’ailleurs à Jeff Gerth en 2021 qu’il avait deux emplois : diriger le pays et affronter les assauts médiatiques.
Trump, dont la personnalité contraste avec les figures de l’establishment, attire aussi l’attention par son style direct et ses affrontements avec la presse, comme lors de son refus de participer à une photo de groupe avec Angela Merkel, ce qui fut interprété comme un acte de rejet. Des épisodes comme l’accusation infondée de fake news pour un prétendu attentat en Suède illustrent comment ses propos peuvent être sortis de leur contexte. C’est finalement un journaliste de BFMTV, Jean-Bernard Cadier, qui a rétabli la vérité : Trump n’a pas employé le terme « terrorisme » en parlant de la Suède.
En 2019, Newsweek publie même une histoire supposant que Trump passait Thanksgiving sur un terrain de golf en méprisant les soldats au front, alors qu’il était en visite auprès des troupes en Afghanistan.
Du « Trump bashing » aussi lors de la dernière campagne
Le « Trump bashing » repart de plus belle tout au long de 2024. Le 17 mars, Trump, lors d’un discours en Ohio, dénonce la stratégie de la Chine d’installer des méga-usines au Mexique et d’exporter des voitures bon marché aux États-Unis. Il souligne qu’il lutterait contre ce dumping social et avertit que, s’il n’est pas élu, il pourrait y avoir un « bain de sang ». En parlant ici de « bain de sang social », il met en garde contre les effets socio-économiques de ces décisions. Néanmoins, certains médias parmi les plus prestigieux relaient la phrase hors contexte, rapportant : « Trump dit que s’il n’est pas réélu il y aura un bain de sang ».
Pendant ce temps, la campagne de Harris est encensée par une grande partie des médias. Elle ne ménage pourtant pas la presse, en accordant peu d’interviews de peur de fauter sur l’un ou l’autre sujet, ce qui s’est avéré, au final, une stratégie désastreuse. Pendant ce temps, Trump et Vance multipliaient les interviews et les meetings en inondant l’espace médiatique. Les lieux de meetings de la candidate démocrate ne sont pas remplis. Pire : souvent les gens les quittent après qu’une chanteuse ou une actrice de Hollywood eurent introduit la candidate. Aujourd’hui la presse relève que la candidate démocrate a fait les mêmes erreurs que la candidate Hillary Clinton pour la même issue – à savoir une défaite. Les analystes commencent à critiquer assez durement la campagne de Harris et ses points faibles. Pourquoi cela n’a-t-il jamais été relevé avant l’issue des résultats ? Il était pourtant assez risqué pour le camps démocrate de mener une campagne très à gauche sur tous les sujets de sociétés alors que les vraies priorités des Américains étaient le pouvoir d’achat, la sécurité, l’immigration, la lutte contre le wokisme, etc. On nous annonçait un résultat très serré, la réalité a été tout autre, avec un raz-de-marée électoral rarement vu dans l’histoire électorale américaine.
Un soutien intact de ses partisans
La force de Trump et d’avoir conservé sa base électorale envers et contre tout. Sa récente condamnation, décrite comme un crime (« felony »), n’est pas sans susciter des interrogations : le jury, composé de citoyens de Manhattan majoritairement démocrates, le condamne pour une question de comptabilité (pas moins de 34 chefs d’accusation autour de « falsifications comptables » – on ne prête qu’aux riches !) liée à 130 000 dollars versés pour acheter le silence d’une actrice porno.
Ces épreuves, qu’elles soient médiatiques ou judiciaires, semblent dirigées pour limiter son engagement sur le terrain, l’épuiser moralement et physiquement. Pourtant, le soutien de ses partisans reste intact. Ils sont comme galvanisés. Lors de la première tentative d’attentat contre lui, la réaction du FBI est vue par certains comme un signe d’une certaine incompétence. Quelques centimètres de plus, et Trump aurait pu ne pas y survivre. Six mois avant, toute allusion à une tentative d’attentat aurait été jugée complotiste.
Finalement, cet ostracisme médiatique et judiciaire ne semble pas avoir affaibli sa base. Le 20 janvier, l’ancien président prendra de nouveau ses fonctions, contre toute attente, démontrant la force du soutien de ses supporters, pourtant qualifiés « d’ordures » par Joe Biden. Un dernier coup pied de l’âne de celui que l’appareil Démocrate a mis de côté sans ménagement ?
Maintenant, il va falloir tenir compte du résultat électoral, que l’Europe prenne les choses en main en termes économiques, militaires, géopolitiques. Cette élection va changer la donne dans beaucoup de domaines. La plupart des leaders européens ont félicité très rapidement Donald Trump hier et ont indiqué vouloir travailler ensemble rapidement avec l’allié important que sont les États-Unis. Voyons comment cela va se concrétiser dans les prochains mois.
Nicolas de Pape
(Photo : Belgaimage)