La section belge de la Licra a vu le jour il y a un mois. Parmi les objectifs de la Ligue contre le racisme et l’antisémitisme : prévenir et combattre les discriminations. Dans ce climat d’antisémitisme montant, sa présidente Isabelle Ekierman s’inquiète. Interview.
21 News : Pourquoi avoir créé le pendant belge de la Licra ? Espérez-vous pesez plus fortement face aux autorités en matière de lutte contre le racisme et l’antisémitisme ?
Isabelle Ekierman : Nous avons en fait recréé la Licra qui existait en Belgique dans les années 1930. La Licra française a été créée en 1927 ; certains disent que c’est une « suite » de l’affaire Dreyfus – même si c’est un peu plus compliqué que cela. La ligue belge, créée par la suite, s’est opposée à Léon Degrelle. Elle est un peu tombée en désuétude après le second conflit mondial et une certaine période d’accalmie au niveau de l’antisémitisme. Aujourd’hui, les représentants de la Licra France, au vu des évènements récents, nous ont demandé de recréer la Licra Belgique. C’est le CCLJ (centre communautaire laïc juif) qui nous abrite dans ses installations à Saint-Gilles. Il convient tout de même de noter que nous avons des missions et des identités bien distinctes, le CCLJ étant un centre laïc et juif et la Licra étant une ligue internationale qui lutte contre le racisme et l’antisémitisme, et qui n’a pas du tout de vocation juive exclusive en tant que telle. Je pense que, par rapport aux autorités, ce qui nous distingue du MRAX, du centre d’action laïque et de l’UNIA, d’abord c’est que nous sommes duels : la lutte contre le racisme et l’antisémitisme sont sur un pied d’égalité. Enfin, nous avons jugé – et la Licra française, aussi, de son côté –, que les politiques belges, enfin, l’essentiel des partis qui la constituent, ne prennent plus la pleine mesure de l’antisémitisme qui gangrène la Belgique. Nous avons estimé qu’il était temps et qu’il était utile de se démarquer de ces autres mouvements et d’ouvrir une autre voie, notamment dans la lutte contre l’antisémitisme.
21 News : À quelle occasion pensez-vous que certains des partis dits « traditionnels » ont démissionné face à l’antisémitisme, justement ?
I. E. : Je pense que le communautarisme régit aujourd’hui les prises de positon politiques dans un cadre purement électoraliste ; ce n’est un secret pour personne. Il me semble que certains partis pour lesquels nous pouvions voter il y a dix ans, nous en sommes aujourd’hui incapables.
« Il y a un amalgame qui est fait entre le conflit israélo-palestinien et ce que représentent les Juifs en Belgique »
21 News : Il semble que les incidents antisémites soient en augmentation en Belgique, et pas seulement depuis le 7 octobre. Comment l’expliquez-vous ?
I. E. : Avant le 7 octobre, il y avait des incidents, mais après cette date, c’est devenu exponentiel. La situation est comparable en France. Il y a un amalgame qui est fait entre le conflit israélo-palestinien et ce que représentent les Juifs en Belgique. En tout cas, ces derniers ne se sentent plus à l’aise dans notre pays ; depuis que la Licra a été recréée, nous avons mis sur pied un service d’aide aux victimes qui a reçu des dizaines de plaintes, que ce soit pour des problèmes sur le lieu de travail, dans un cadre plus privé, ou enfin dans les universités, où les étudiants juifs se sentent terriblement menacés.
21 News : Pensez-vous que les chercheurs qui alertent sur cette recrudescence de l’antisémitisme sont assez écoutés ?
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