Dans un rapport publié au début de ce mois, l’ONG Amnesty International accuse l’État israélien de « génocide » contre la population palestinienne de Gaza. Une « faute irrémissible », selon Joël Rubinfeld, président de la Ligue belge contre l’antisémitisme. Opinion.
Le 7 octobre 2023, dans le sud d’Israël, 6000 terroristes et civils palestiniens envahissent simultanément plusieurs kibboutzim, un festival de musique en plein air et des bases de Tsahal. Ils assassinent méthodiquement chaque homme, femme et enfant sur leur chemin – 1200 au total – et kidnappent 251 otages qu’ils brandissent tels des trophées à Gaza, en pleine liesse collective.
Le 7 octobre, un terroriste palestinien appelle ses parents pendant les massacres : “ Papa, je te parle du téléphone d’une juive ! Je l’ai tuée ! J’ai tué son mari ! Je les ai tués de mes propres mains ! J’en ai tué dix ! Leur sang est sur mes mains ! Regarde combien j’ai tué de juifs ! Regarde combien j’en ai tué ! Passe-moi maman ! ” “ Tue-les ! Tue-les ! Tue-les ! Tue-les tous ! ” répond le père. Une note trouvée sur le corps d’un autre terroriste indique le message suivant: “ L’ennemi est une maladie qui n’a pas de remède, sauf la décapitation et l’ablation des cœurs et des foies. ” Les exemples glaçants attestant du dessein génocidaire de l’assaut lancé par le Hamas le 7 octobre sont innombrables.
Ce jour-là, le monde est témoin de la mise en œuvre de l’article 7 de la charte du Hamas : “ Le Jour du Jugement n’arrivera pas tant que les musulmans n’auront pas combattu et tué les juifs, lorsque les juifs se cacheront derrière des pierres et des arbres. Les pierres et les arbres diront ‘Ô musulmans, Ô serviteurs d’Allah, il y a un juif derrière moi, venez et tuez-le.’ ”
Et si l’armée israélienne n’avait stoppé l’offensive palestinienne dans les 48 heures qui suivirent, ce n’est pas de pogroms que l’on parlerait aujourd’hui mais de génocide. Tant l’intention (charte) que la matérialité (pogroms) sont réunies ce 7 octobre 2023.
Sur ce génocide avorté, Amnesty International observe un silence religieux.
Il en va tout autrement s’agissant du rapport publié le 5 décembre 2024 par Amnesty qui accuse… Israël de commettre un “ génocide ” dans la guerre déclarée par le Hamas le 7 octobre.
Méphitique sequel de “ 1984 ” dans lequel le Hamas devient l’agressé, Israël l’agresseur, et Amnesty la Vérité, ce rapport affiche sa couleur verdâtre dès la première ligne avec une inversion du réel que seul Orwell aurait osé coucher sur le papier : “ Le 7 octobre 2023, Israël a lancé une offensive militaire d’une ampleur, d’une portée et d’une durée sans précédent sur la bande de Gaza occupée. ” Se rendent-ils seulement compte qu’en entamant leur réquisitoire par ces mots, les rédacteurs du rapport discréditent tous ceux qui viendront après ?
Question crédibilité, il faut reconnaître que cela fait un moment qu’Amnesty est un Roi nu. Passons en revue quelques-uns des jalons d’une inexorable déchéance. En 2010, Amnesty Belgique milite avec succès pour la libération du terroriste Oussama Atar, le cerveau des attentats du 13 novembre 2015 à Paris et du 22 mars 2016 à Bruxelles. En 2022, le directeur d’Amnesty USA déclare qu’Israël “ ne devrait pas exister en tant qu’État juif ”. La même année, l’ONG accuse Israël de mener une politique d’“apartheid”. En 2023, le président d’Amnesty France se refuse à qualifier le Hamas de groupe “ terroriste ”. En 2024, l’ONG rend hommage au terroriste palestinien du FPLP Walid Daqqa, le présentant comme un “écrivain palestinien”. Et le 5 décembre 2024, Amnesty publie un rapport titré “ Le génocide des Palestiniens et Palestiniennes commis par Israël à Gaza ”.
Amnesty, borgne au monocle grossissant
Ce rapport d’Amnesty à charge d’Israël pèche doublement : par ce qu’il dit et par ce qu’il ne dit pas. Ainsi, en faisant l’impasse sur la panoplie de mesures adoptées par Tsahal pour réduire autant que possible le nombre de victimes civiles palestiniennes.
Quid, par exemple, des millions de tracts d’avertissement largués par les airs, d’appels téléphoniques et de sms envoyés depuis le début de la guerre aux Gazaouis dans les zones ciblées, ou du recours au roof knocking (“coup sur le toit”), cette pratique militaire inventée par l’armée israélienne qui consiste à tirer un obus vide sur le toit d’une habitation pour prévenir ses occupants de l’attaque sans les blesser, avant de tirer à charge réelle 10 à 15 minutes plus tard ?
Le 25 janvier 2022, lors d’une réunion des Nations Unies sur le thème “ La guerre urbaine et la protection des civils ”, le Secrétaire général de l’ONU indique que lors des conflits en milieu urbain, “ environ 90% des personnes tuées ou blessées sont des civils ”, soit un ratio de 9 victimes civiles pour un combattant. Dans le cas présent, si l’on croise les chiffres fournis par le Hamas (45.000 morts palestiniens) et Israël (19.000 terroristes palestiniens éliminés), le ratio est de 1,37/1, soit 7 fois moins que la norme renseignée par António Guterres.
C’est sur base de ces éléments que John Spencer, directeur des Études sur les guerres urbaines du Modern War Institute, pose le constat suivant: “ Israël a fait plus pour éviter les pertes civiles dans la guerre que n’importe quelle armée dans l’histoire – au-delà de ce que le droit international exige et plus que les États-Unis dans leurs guerres en Irak et en Afghanistan –, établissant une norme qui sera à la fois difficile et potentiellement problématique à reproduire. ”
Au risque d’énoncer une évidence, il n’y a pas de génocide en cours à Gaza. Et cela, Amnesty ne peut l’ignorer. Pas plus qu’il ne peut ignorer les éléments factuels précités.
C’est donc sous un autre angle qu’il faut comprendre ce brûlot accusant l’État juif du crime des crimes : celui du “ bordereau ” accusateur de l’Affaire Dreyfus. Dit autrement, Amnesty est l’auteur d’une forgerie, d’un de ces libelles antisémites contemporains qui substituent l’État à l’individu pour prêcher, dans une langue dévoyée des droits de l’homme, une vieille haine recyclée.
En publiant ce rapport infamant, Amnesty International s’est rendu coupable d’une faute irrémissible qui, souhaitons-le, résonnera dans les manuels d’histoire comme le chant du cygne de l’autrefois respectable ONG fondée en 1961 par l’avocat juif britannique Peter Benenson.
Joël Rubinfeld, Président de la Ligue belge contre l’antisémitisme
(Photo Belgaimage : action de militants d’Amnesty devant l’ambassade d’Israël de Bruxelles, 9 décembre 2024)