Tant en Belgique (à l’exception notoire de Groen à Bruxelles) qu’en Europe (Allemagne, France), les partis écologistes ont perdu des plumes lors des dernières élections, tant nationales que régionales voire plus locales. Pourquoi ? Tentative d’explications.
Les crises économiques et sociales : Les priorités des électeurs ont souvent tendance à se recentrer sur l’économie et le social en période de crises (inflation, coût de la vie, crise énergétique). Les politiques écologistes, perçues comme coûteuses ou contraignantes (taxes carbone, restrictions sur certains secteurs économiques), peuvent être moins bien acceptées dans ces contextes. Globalement, l’écologisme est perçu comme punitif et ne laissant que peu d’espoir.
Le citoyen se sent impuissant : Il trie les déchets (quatre et bientôt cinq poubelles différentes avec les déchets organiques, ce qui est difficilement gérable en appartement). En tâchant de réaliser des petits efforts au quotidien, le citoyen estime avoir fait tout son possible.
Manque de réalisme : Certaines propositions des partis écologistes sont perçues par une partie de la population comme irréalistes ou déconnectées des préoccupations quotidiennes, notamment en matière d’emploi, de logement et de mobilité. Des propositions comme l’interdiction de certains types de véhicules ou des restrictions sur les industries traditionnelles peuvent apparaître excessives ou impraticables pour de nombreux citoyens (lire par ailleurs).
Un rejet de l’écologie « punitive »
Réactions aux politiques restrictives : Des politiques environnementales strictes, comme la limitation de la voiture dans certaines villes ou l’interdiction de certains chauffages, ont parfois été mal reçues par la population. Cela peut conduire à un rejet des partis qui les soutiennent, les électeurs se tournant alors vers des partis proposant des approches plus souples ou pragmatiques. Le citoyen doit se rendre à son travail, quoi qu’il advienne. Il peut éventuellement opter pour le transport en commun – s’il n’y a pas trop de rupture de charge – ou des méthodes « douces » comme la trottinette électrique. Mais dans le nord de l’Europe, il pleut 200 jours par an. Ce n’est pas forcément évident. La voiture reste le moyen le plus rapide en cas de multiples ruptures de charge (pas dans les villes, où l’aménagement du territoire sanctionne largement la voiture).
Bad Move : La politique anti-voiture des écologistes mène à des situations ubuesques et à la paralysie totale, comme à Bruxelles, Anvers mais aussi Paris (où la socialiste Anne Hidalgo a, avec les écologistes, paralysé la circulation). On a vu des ambulances dans l’incapacité d’atteindre leur hôpital (hôpital Saint-Jean à Bruxelles, par exemple). Demain, des pompiers ne pourront pas aller sauver des gens qui brûlent dans leur immeuble faute d’une voirie suffisamment large. Les écolos pensent que tout peut se faire en trottinette. À Anderlecht, les riverains immigrés se sont rebellés et le good move a été abandonné.
Crise du logement : Les écolos et leur idéologie sont en passe de créer une énorme crise du logement avec les certificats d’isolation qui empêchent déjà des propriétaires de louer leur « appartement-passoire ».
Voiture électrique : mesure écologiste-phare – bien que sur un cycle de vie complet elle ne soit pas si verte que cela —, la voiture électrique déçoit les particuliers car son autonomie est faible, son prix encore trop élevé par rapport aux thermiques et la charge, à la maison, coûteuse et très lente. Les bornes de charge rapide sont encore assez rares et l’électricité, bien que revenue à un prix raisonnable, n’est pas bon marché. Pour les longues distances (vacances dans le sud de la France), la voiture électrique n’est pas pratique. Seule la bourgeoisie peut se permettre deux voitures : une thermique et une électrique.
Une communication inadéquate
Montée des partis « populistes » ou « souverainistes » : Dans de nombreux pays européens, la montée des partis « populistes » de droite (parfois aussi de gauche) a conduit à un déplacement du débat vers des sujets tels que l’immigration, la sécurité, les frontières et la souveraineté économique. Ces thèmes ont éclipsé les questions environnementales dans l’agenda politique. Les manifestations d’agriculteurs, écrasés par des normes contradictoires, nationales et européennes, ont agi comme un catalyseur car l’agriculture reste un référent historique pour les Européens qui sont tous d’ascendance rurale si on remonte de quelques siècles.
Stratégie de communication : Les écologistes ont parfois du mal à communiquer de manière claire et positive sur leurs propositions. Certains électeurs les perçoivent comme moralisateurs ou alarmistes, ce qui peut rebuter ceux qui ne se sentent pas directement concernés par les problématiques climatiques. Les écologistes ont une approche parfois « effondriste », notamment autour du réchauffement climatique, que même des proches du GIEC dénoncent. Il y a un côté « fin du monde » qui peut « désespérer Billancourt ». D’autant que les médias – la plupart alarmistes –, mais aussi des instances comme l’ONU et son secrétaire-général, Antonio Gutierrez, ne cessent d’affirmer que cela s’aggrave et qu’il est « minuit moins une ».
L’écologisme inefficace
Inquiétudes sur la transition énergétique : La transition vers des énergies plus propres suscite des inquiétudes, notamment en ce qui concerne la perte potentielle d’emplois dans les secteurs traditionnels (nucléaire, pétrochimie, automobile). Les électeurs craignent des répercussions économiques et sociales si la transition est trop rapide ou mal gérée. Le citoyen se rend compte également que la transition vers des énergies dont il vient de découvrir qu’elles étaient intermittentes (notamment les panneaux solaires placés sur son toit et qui produisent zéro électricité l’hiver) est une impasse. Il sent aussi qu’on lui a menti sur l’énergie nucléaire ; que cette énergie bas carbone était indispensable et qu’on lui a fait inutilement peur (rappelons que la catastrophe de Fukushima, due essentiellement à une catastrophe naturelle – un tsunami – n’a pas causé de mort directe à cause des irradiations).
Absence de résultats tangibles : Les écologistes sont souvent jugés sur leur capacité à apporter des changements concrets. Cependant, même lorsqu’ils ont été en position de gouverner, les résultats tangibles en matière d’environnement (réduction des émissions, amélioration de la qualité de l’air) restent difficiles à percevoir pour le grand public, qui peut alors estimer que les politiques mises en œuvre sont inefficaces.
Clientélisme, mauvaise gestion
Clientélisme musulman voire pro-Hamas : Les écologistes ont littéralement instrumentalisé le conflit à Gaza, faisant de la surenchère communautariste à l’attention des électeurs musulmans surtout à Bruxelles. Les écolos-bobos ont pu considérer qu’il y avait des excès, voire même que ça alimentait la haine anti-juive et minait le vivre-ensemble.
Insécurité. Dans de nombreuses villes gérées par les écologistes (Grenoble, Bordeaux…), l’insécurité grandit assez rapidement. Positionnés à l’extrême-gauche, les écologistes accordent peu d’importance à la lutte contre la délinquance, priorité de droite voire d’extrême-droite. Or même un écolo-bobo, lorsqu’il est cambriolé trois fois, il la trouve mauvaise.
Nicolas De Pape
(Photo : Jean-Marc Nollet et Rajae Maouane, ex-coprésidents d’Ecolo – Belga)