En 2024, la Belgique a connu une croissance modérée, principalement soutenue par la consommation intérieure et les dépenses publiques, révèle le rapport annuel de la BNB publié jeudi. Malgré un taux de vacance élevé, la création d’emplois s’est essoufflée, limitant la dynamique du marché du travail. Parallèlement, l’inflation belge s’est maintenue à un niveau parmi les plus élevés de la zone euro, mettant en lumière des tensions persistantes sur les coûts. Les ménages en ont souffert.
L’année 2024 s’inscrit dans un contexte économique global relativement stable, malgré des tensions géopolitiques persistantes et un environnement protectionniste accru. Pour la Belgique, la croissance économique a atteint environ 1 % en glissement annuel, légèrement au-dessus de la moyenne de la zone euro, mais toujours loin des performances américaines.
Ce dynamisme modéré repose essentiellement sur la demande intérieure, en particulier la consommation des ménages. Après une période d’épargne prudente en raison de l’inflation et des incertitudes économiques, les Belges ont retrouvé le chemin de la consommation, bénéficiant de la hausse des revenus réels due aux indexations salariales passées et à la diminution des prix de l’énergie. La consommation a ainsi progressé de près de 2 %, un rythme supérieur à la croissance du revenu disponible, traduisant une baisse du taux d’épargne.
Les dépenses publiques ont également joué un rôle significatif, notamment via l’accélération des investissements en infrastructures, la hausse des dépenses militaires et l’augmentation des dépenses de soins de santé. Cependant, l’investissement des entreprises a marqué un net recul en 2024, notamment dans l’industrie, freinée par des incertitudes réglementaires et des coûts de production élevés.
Enfin, les exportations belges ont connu un fort repli pour la deuxième année consécutive, entraînant une perte de parts de marché significative. Toutefois, une baisse parallèle des importations a permis de maintenir un solde commercial relativement stable.
Un marché du travail en panne malgré des besoins élevés
Alors que la Belgique affichait jusqu’en 2023 une dynamique de création d’emplois robuste, 2024 marque un tournant avec un net ralentissement. Environ 13 000 emplois supplémentaires ont été comptabilisés, mais cette progression est entièrement due au secteur public et aux indépendants, tandis que l’emploi salarié dans le secteur marchand a diminué.
Le taux de vacance d’emploi demeure élevé en Belgique, notamment en Flandre, mais les créations de postes ne suivent pas. Plusieurs facteurs expliquent cette stagnation :
- L’automatisation et la numérisation accrues dans le secteur privé, qui ont amélioré la productivité sans générer d’emplois.
- Un ralentissement du marché industriel lié aux coûts élevés de l’énergie et aux incertitudes économiques.
- Des rigidités structurelles du marché du travail, notamment des difficultés de mobilité entre les régions et un manque d’adéquation entre les compétences disponibles et les besoins des employeurs.
Bien que la création d’emplois se soit quasiment interrompue, le taux de chômage harmonisé est resté stable à 5,7 %, un niveau historiquement bas pour la Belgique. Cependant, cette apparente stabilité masque une problématique plus structurelle : un taux de participation au marché du travail toujours inférieur à celui des pays voisins, avec une proportion importante d’inactifs. La faible progression du taux d’emploi, inférieure à la moyenne de la zone euro, illustre ces défis persistants.
Une inflation parmi les plus élevées de la zone euro
Après un recul temporaire fin 2023, l’inflation est repartie à la hausse en 2024, atteignant 4,3 % sur l’année selon l’indice harmonisé (IPCH). Ce niveau est l’un des plus élevés de la zone euro, où l’inflation moyenne s’est stabilisée autour de 2,4 %.
Plusieurs facteurs expliquent cette résurgence :
- Une inflation énergétique spécifique à la Belgique, qui s’élève à près de 10 %, alors qu’elle reste négative dans la zone euro. Cette divergence s’explique par la suppression des aides publiques aux ménages et par certaines différences méthodologiques dans le calcul des indices.
- Une hausse marquée des prix des services, en raison de l’impact persistant des hausses salariales de 2022-2023 et de la forte indexation des coûts de main-d’œuvre.
- L’augmentation des accises sur le tabac et certains biens de consommation, qui a contribué artificiellement à maintenir l’inflation à un niveau élevé.
L’inflation sous-jacente, hors énergie et alimentation, continue toutefois de reculer progressivement, repassant sous la barre des 3 % fin 2024, mais restant près du double de la moyenne de long terme. Si la pression sur les biens a diminué grâce à la baisse des coûts internationaux, les prix des services restent sous tension, illustrant la persistance des hausses salariales passées dans les coûts de production.
Résilience
L’économie belge a montré en 2024 une certaine résilience, soutenue principalement par la consommation intérieure et l’augmentation des dépenses publiques. Cependant, la faible création d’emplois, couplée à une inflation parmi les plus élevées de la zone euro, soulève des interrogations sur la compétitivité et la capacité du pays à retrouver une dynamique de croissance plus vigoureuse. Face à ces défis, la BNB insiste sur la nécessité de réformes structurelles, en particulier sur le marché du travail et dans la gestion des finances publiques, afin de garantir une croissance durable et maîtrisée.
La Rédaction
(Photo Hatim Kaghat : le gouverneur de la BNB, Pierre Wunsch)