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Réaction ferme aux propos du ministre Beenders (Vooruit), qui veut imposer des quotas de genre aux entreprises

par Lode Goukens

Rob Beenders (Vooruit), ministre de la Protection des consommateurs, de la Lutte contre la fraude sociale, de l’Égalité des chances et des Personnes en situation de handicap, a laissé certains médias consulter ce week-end sa déclaration de politique ministérielle. Cependant, le texte n’est pas encore accessible au grand public. En réaction aux articles parus dans la presse, Georges-Louis Bouchez, président du MR, un parti de la coalition gouvernementale, a immédiatement rejeté la proposition.

“Cette proposition a été clairement rejetée lors de la négociation de l’accord de gouvernement”, a posté Bouchez sur X. “Que chacun le respecte. Les actionnaires choisissent leurs administrateurs. Celui qui investit parfois des millions n’a pas à se faire imposer les personnes qui pilotent l’entreprise.” Le président du MR a ainsi mis le doigt sur un point sensible, appelant d’abord l’État à donner l’exemple : “Que l’État gère déjà correctement ses affaires avant de vouloir gérer les entreprises à la place de ceux qui les détiennent.”

Qui est Beenders et que veut-il ?

Beenders, qui lui-même souffre d’un handicap auditif, a surpris en obtenant un portefeuille ministériel dans le nouveau gouvernement fédéral pour le parti Vooruit. Sa proposition s’inscrit dans une tendance européenne visant à rendre obligatoire une parité hommes-femmes dans les comités de direction des grandes entreprises cotées en bourse. Cette directive européenne doit être transposée en droit belge d’ici 2026.

Mais le MR, ainsi que les partis flamands CD&V et N-VA, s’y opposent. La question est donc de savoir s’ils pourront empêcher cette mesure symbolique. Conscient de ces résistances, Beenders a stratégiquement diffusé sa déclaration de politique générale à certains médias avant de la présenter au Parlement. On y lit : “En tant que membre du gouvernement en charge de l’égalité des genres, je m’efforcerai durant cette législature de renforcer l’égalité entre les femmes et les hommes dans les fonctions décisionnelles.”

Une directive européenne contestée

La directive exige que la part minimale de femmes dans les conseils d’administration passe de 33 % à 40 %. Initialement limitée aux conseils d’administration, elle a récemment été élargie aux comités de direction, une extension qui suscite encore plus de réticences.

L’accord de gouvernement apparaît ici comme un obstacle, car selon Beenders, la Commission européenne insiste pour que cette directive soit transposée. En soi, la proposition ne constitue pas une surprise, bien que la VRT et De Tijd l’aient présentée comme telle. Ces médias s’appuient sur le fait que Vooruit avait tenté d’imposer cette mesure lors des négociations gouvernementales, mais s’était heurté à un refus catégorique.

Fait marquant : Beenders affirme aujourd’hui avoir consulté toutes les formations de la coalition, qui seraient donc d’accord. Cela laisse penser que la réaction de Bouchez relève surtout d’une posture politique. Un bel exercice de théâtre politique.

Une efficacité non prouvée

Beenders justifie sa proposition en affirmant que “plus de diversité dans les entreprises conduit à de meilleures décisions et à de meilleures performances.” Or, cette affirmation n’a jamais été scientifiquement prouvée à travers des études longitudinales. Il s’agit davantage d’un vœu pieux.

Détail piquant : au sein de la Commission européenne, c’est une protégée de Bouchez, la commissaire Hadja Lahbib (MR), qui est chargée de ce dossier et qui met la pression sur la Belgique pour qu’elle applique la directive avant 2026.

Dans sa déclaration, Beenders reste néanmoins vague. S’il applique la directive de l’UE, au moins un tiers des membres des comités de direction devront être des femmes. Une mise en conformité qui représenterait un défi pour les entreprises belges cotées en bourse, où la proportion actuelle avoisinerait un sur six après des années de lobbying.

Un débat récurrent

Cette proposition s’inscrit dans une longue série de tentatives. Sous le gouvernement De Croo, la secrétaire d’État Marie-Colline Leroy (Ecolo) avait déjà tenté d’imposer des quotas, mais s’était heurtée au CD&V et aux libéraux.

La N-VA, elle, reste fidèle à sa ligne : la compétence avant tout. La députée Kathleen Depoorter (N-VA) a réagi en ces termes : “Les quotas obligatoires ne sont pas conformes à l’accord de gouvernement et ne sont pas une bonne idée. En tant que femme, je veux siéger dans un conseil d’administration parce que je suis la meilleure candidate. En Norvège, les quotas ont conduit certaines entreprises à se retirer de la bourse. Est-ce ce que nous voulons ?”

Un clivage idéologique

Une chose est claire : les quotas de genre n’ont pas été inclus dans l’accord de gouvernement en raison d’un manque de consensus. Ce dossier hautement symbolique met en lumière deux visions politiques opposées :

  • D’un côté, une approche interventionniste où l’État doit imposer des règles pour améliorer la société.
  • De l’autre, une approche plus libérale où ces évolutions doivent être laissées à la dynamique sociale.

Les quotas comportent un risque psychologique : ils peuvent dévaluer les femmes qui accèdent aux postes de direction par leur propre mérite et renforcer le préjugé selon lequel elles seraient moins compétentes. Les femmes qui siègent en comité de direction risquent alors d’être perçues – à tort ou à raison – comme ayant obtenu leur poste grâce à leur genre plutôt que grâce à leurs compétences.

Lode Goukens

(Photo Belga Nicolas Maeterlinck)

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